Bière : le houblon français en voie de disparition
Brasseurs de France tente de relancer la filière houblon. Il ne reste que 50 producteurs alors que le marché de la bière est en croissance.
La culture du houblon va-t-elle complètement disparaître en France ? Alors que la consommation de bière est repartie en France depuis trois ans grâce aux bières artisanales, la pénurie est manifeste dans l’Hexagone. La situation est telle que la demande française est à 80 % couverte par des importations d’Allemagne, de République tchèque et des Etats-Unis.
Traumatisme passé
En fait, « on ne cultive plus de houblon en France que sur 465 hectares quand il en faudrait 2.500 pour satisfaire la demande nationale », explique Maxime Costilhes, le délégué général de Brasseurs de France. Plus impressionnant encore, il ne reste que 50 producteurs de houblon, alors qu’ils étaient encore une centaine il y a dix ans. Que s’est-il passé ?
En 2008, le belgo-brésilien Inbev, premier brasseur mondial, achète son rival américain Anheuser-Busch , connu pour la Budweiser. Au passage, il met un terme à de très gros contrats avec les houblonniers français, dont la production entrait dans la fabrication de la célèbre marque américaine. Les prix du houblon n’étaient pas au mieux de leur forme à ce moment-là. La consommation de bière non plus. Résultat, la moitié des producteurs français, essentiellement alsaciens ont arraché leurs plantations. « Un vrai traumatisme encore présent dans les esprits », commente Aurélien Ingwiller, producteur de houblon en Alsace.
Culture délicate
La pente à remonter n’est pas simple d’autant que les prix du houblon varient notablement. « De-ci de-là, on aide de nouvelles vocations à se déclarer. Mais on ne fait rien sans débouchés, garantis par contrats », dit Antoine Wuchner, directeur commercial de la coopérative Le Comptoir agricole. Aux incertitudes de marché, s’ajoutent les difficultés propres à la culture du houblon. Une houblonnière requiert un suivi aussi précis que celui de la vigne. « Le houblon ça pousse de 30 centimètres par nuit pour atteindre de 8 à 9 mètres. Il faut être dans la plantation tous les jours pour repositionner les lianes sur les câbles », dit encore Aurélien Ingwiller.
L’investissement de départ est lourd, de l’ordre de 900.000 euros pour 15 hectares. La main-d’oeuvre, abondante d’avril à juillet, puis au moment de la récolte en septembre est rare et chère. « La tâche est physique. En Alsace, nous employons de longue date des femmes turques, qui connaissent bien ce travail », précise Aurélien Ingwiller.
L’épice de la bière
La mayonnaise commence à prendre tout doucement. Les plantations ont augmenté légèrement ces dernières années, portées par la demande des microbrasseries . « Il y a même un Breton qui va se lancer dans le Finistère sud », dit Antoine Wuchner. « Le problème des microbrasseries est qu’elles ne savent pas bien définir le type de houblon qu’elles veulent ». Le houblon n’entre que pour 2 % dans les bières industrielles, car il est cher (9 euros le kilo) mais pour beaucoup plus (jusqu’à 8 % ou 10 %) dans les bières de microbrasseries. Multiples, les variétés de houblon donnent plus ou moins d’amertume et définissent les arômes. Elles sont clef pour le goût.