
Comment le français Castel veut rester incontournable dans la bière en Afrique
Numéro deux de la bière en Afrique, le très discret groupe Castel est en pleine réorganisation sur ce continent. L’entreprise familiale française modifie sa stratégie et s’y renforce. Elle se diversifie, verdit ses activités et investit dans l’amont agricole.
Castel… Un chiffre d’affaires de 6 milliards d’euros. 250 filiales. 37.000 salariés. Roi du vin, roi de la bière, le groupe est pourtant largement méconnu du public. Pierre Castel est pourtant numéro deux de la bière en Afrique, numéro un du vin en Europe avec des marques d’entrée de gamme comme Vieux Papes et Baron de Lestac. Il est également propriétaire de la chaîne de cavistes Nicolas.
C’est d’abord dans la bière en Afrique que le groupe s’est taillé un empire, au point d’y réaliser aujourd’hui 85 % de son chiffre d’affaires. Après soixante ans d’activité sur ce continent, alors que des grands groupes – Bolloré, Zara, Diageo, AB InBev… – cèdent une partie de leurs actifs ou se retirent, le groupe est, lui, plus résolu que jamais à y développer ses affaires sous le nom de sa filiale BGI.
Cession de l’eau
Cet objectif ne va pas sans des changements assez profonds de stratégie. Castel souhaite revoir ses métiers, se diversifier, élargir sa présence à plus de 21 pays en Afrique et poursuivre sa croissance externe. D’ores et déjà, il a entamé sa sortie de l’eau en bouteille trop liée au plastique et dix fois moins rentable que la bière.
Après s’être délesté de son pôle eau en France en 2008 (Cristaline, Châteldon, Vichy Saint-Yorre…), il veut maintenant vendre cette division en Afrique, où il détient 17 marques d’eau (au Bénin, au Burkina Faso, au Cameroun, en Côte d’Ivoire, au Gabon, au Maroc, au Tchad et en Tunisie). Ain Ifrane au Maroc et les marques locales en Côte d’Ivoire ont déjà été cédées en 2022.
Diversification
Le groupe entend se concentrer sur la bière, les boissons gazeuses et les mélanges alcoolisés (prémix), qui connaissent un engouement important en Afrique. Pour y parvenir, il vise la maîtrise de ses emballages et cherche à donner plus d’importance au verre. C’est dans cette optique qu’il va acquérir Alver, le leader du verre en Algérie, ce qui porte à quatre le nombre de ses verreries par ailleurs situées au Cameroun, en Angola et au Maroc.
Castel renforce ainsi ses capacités de production et ses ventes de bouteilles en Algérie, une base d’exportation vers l’Afrique de l’ouest et l’Europe. Le gaz et le sable largement disponibles y rendent très compétitive la fabrication du verre. BGI souhaite développer le verre consigné. Au-delà du caractère vertueux de cette production, l’idée est aussi de se distinguer de la concurrence.
L’expérience du Covid a laissé des traces en Afrique et convaincu le groupe de l’opportunité de productions de plus en plus localisées. Le manque de dockers pour décharger, le blocage des containers, la flambée des coûts logistiques nés de la pandémie ont poussé BGI à acquérir des terres agricoles et à contractualiser la production d’orge brassicole, de maïs et de riz pour disposer localement de la matière première nécessaire à l’élaboration de la bière.
Ethanol
Au Cameroun, le groupe a ouvert une usine de gritz de maïs, riche en amidon, fermentescible, un complément appréciable du malt. Il y produit du sucre et bientôt de l’éthanol pour élaborer des prémix alcoolisés. L’objectif est d’assurer au moins la moitié de ses besoins en alcool. Près de 12.500 agriculteurs fournissent de l’orge à Castel. C’est autant d’importations en moins. A Madagascar, il est autonome pour 50 % de ses besoins et continue d’investir dans des malteries.
A l’affût des opportunités de croissance au rythme d’une à deux acquisitions par an, le groupe français a, il y a quelques mois, enrichi son parc industriel de 100 usines de deux nouvelles brasseries Guinness cédées par le britannique Diageo, numéro un mondial des spiritueux (Smirnoff, Johnny Walker). L’opération, qui incluait Meta Abo Brewery à Sebeta (Ethiopie) et une brasserie à Douala (Cameroun), s’est faite pour plus de 1 milliard d’euros. Au passage, Castel a aussi obtenu la licence pour distribuer la Guinness au Cameroun, ce qui lui permet de contrôler 80 % du marché local, où il produisait déjà des bières blondes dans ses cinq brasseries.
Par Marie-Josée Cougard – A retrouver en cliquant sur Source
Source : Comment le français Castel veut rester incontournable dans la bière en Afrique