Changement de ton chez Nestlé. Après avoir jeté un froid sur les marchés en février en présentant les perspectives du groupe, Mark Schneider, le nouveau patron du leader mondial de l’agroalimentaire, a entrepris de restaurer la confiance des investisseurs, dont certains n’avaient pas hésité à évoquer « la fin du modèle Nestlé » en leur consacrant une journée entière à Londres. Signe d’un contexte particulier, marqué par la remise en cause de la stratégie du géant suisse par l’activiste Daniel Loeb, alors que le marché de l’alimentation mondial est en plein chambardement.

D’un discours qui ressemblait à  un programme d’austérité destiné à affronter le gros temps , Mark Schneider, est passé à des propos offensifs en matière de rentabilité, d’économies et de meilleure rémunération des actionnaires via une accélération des rachats d’actions. Ceux-ci pourraient atteindre 20 milliards de francs suisses (17,4 milliards d’euros) sur une durée de trois ans.

Marge accrue

Au lieu d’insister sur l’abaissement des objectifs de croissance, Mark Schneider a annoncé un objectif de marge opérationnelle récurrente entre 17,5 % et 18,5 % d’ici 2020, soit une hausse de 1,5 % à 2,5 % par rapport à son niveau de 2016. C’est nettement plus que Danone, qui vise 16 % sous trois ans et moins qu’Unilever qui a mis la barre à 20 %. Les ambitions de rentabilité iront de pair avec « une discipline des coûts accrue ».

Pas de changement concernant L’Oréal

Le patron de Nestlé n’entend pas changer de ligne concernant sa participation dans L’Oréal. « Notre approche à cet égard ne change pas », a-t-il déclaré mardi. Le pacte d’actionnaires entre L’Oréal et Nestlé prendra fin dans six mois, suite au décès de Liliane Bettencourt. A cette date, en mars 2018, Nestlé sera libre de vendre ou de se renforcer au sein de L’Oréal. A ce jour, La famille Bettencourt-Meyers détient 33,31 % du groupe, et Nestlé, 23,29 %. Si la famille décidait d’aller au-delà, elle serait contrainte de lancer une offre publique obligatoire.

Les économies de coûts cumulés vont tripler de 160 millions de francs suisses en 2017 à 500 ou 600 millions en 2020, les dépenses immobilières seront rationalisées ainsi que les coûts de gestion des retraites. En 2016-2017, Nestlé a fermé ou vendu 11 usines. Six autres fermetures sont prévues. Les coûts de restructuration sur la période 2016-2020 sont estimés à 2,5 milliards de francs suisses. L’objectif de croissance organique ne bouge pas en revanche.

Acquisitions

Le groupe a prévenu qu’il « poursuivra les opportunités externes de croissance s’inscrivant dans les catégories et les géographies ciblées », à condition qu’elles « offrent des rendements attrayants et s’appuient sur les positions de leadership de Nestlé ». Nestlé prévoit un volume de cessions ou d’achats d’actifs pour un volume de ventes combinés de près de 10 milliards de francs suisses. Mais une sortie du capital de l’Oreal, dont Nestlé détient toujours 26 % soit une valeur de 25 milliards d’euros, n’est pas à l’ordre du jour (cf encadré).

Multiplier les innovations

Pour Marc Schneider, il n’est pas douteux que « Nestlé a des fondations solides, une vision claire et un brillant avenir. Nous avons prouvé notre capacité à délivrer une performance pérenne à la pointe de l’industrie », a-t-il insisté. Cependant les habitudes des consommateurs évoluent de plus en plus vite, et obligent les majors de l’alimentation à se remettre en question. Les exigences sont multiples et parfois difficiles à anticiper. Les marques nouvelles foisonnent et bousculent les codes. A charge pour l’industrie de s’adapter. « Nous allons croître en restant à l’avant-garde des tendances de consommation et en répondant aux aspirations de vie meilleure et plus saine », a martelé le patron du leader mondial.

Secteurs prioritaires

Pas de bouleversement dans les fondamentaux cependant. L’alimentation et les boissons demeurent les fers de lance du groupe tandis que les produits de santé grand public sont considérés comme « une plateforme de croissance additionnelle ». Parmi les produits phares, le café, les produits pour animaux de compagnie, la nutrition infantile et l’eau en bouteille. Nestlé concentrera ses dépenses sur ces secteurs « à forte croissance » et sur les pays émergents pour accélérer sa rentabilité. Le rachat récent de Blue Bottle Coffee aux Etats-Unis s’inscrit dans cette ligne, tout comme la décision de céder le pôle confiserie aux Etats-Unis.