Covid : l’hôtellerie française a encore du vague à l’âme
Selon le cabinet MKG, le taux d’occupation moyen des établissements en France métropolitaine a atteint 43,7 % l’an dernier. Il s’améliore de 11,2 points par rapport à la fin 2020. La situation du secteur demeure très contrastée, le haut de gamme et l’hôtellerie parisienne étant encore très déprimés.
Après le choc historique de 2020 , l’hôtellerie française a repris des couleurs l’an dernier. L’amélioration est toutefois plus ou moins marquée selon les destinations et les positionnements, et rares sont les professionnels à se targuer d’avoir rattrapé leur niveau de 2019.
« Après une année 2020 sans précédent, 2021 a marqué la lente remontée des performances hôtelières vers leurs niveaux d’avant-crise », indique ainsi le cabinet spécialisé MKG, dans son dernier point annuel de conjoncture, publié vendredi, avant d’ajouter : « Mais, les dynamiques sont plus hétérogènes que jamais selon les territoires et périodes de l’année ». L’impact du couvre-feu du début 2021 et du confinement ont notamment été sensibles. En revanche, la saison estivale a été porteuse sauf pour les grandes agglomérations, en premier lieu Paris, l’automne étant aussi favorable au secteur.
La France résiste
Au global, précise MKG, le taux d’occupation moyen des établissements de la France métropolitaine atteint 43,7 %, en retrait de 25,2 points par rapport à 2019, le rattrapage étant de 11,2 points par rapport à la fin 2020 (-36,4 points, en comparaison à 2019). Quant à la recette unitaire par chambre disponible (RevPAR), indicateur de référence des hôteliers en termes de rentabilité, le recul par rapport à 2019 est ramené de 61,2 % à 43 %.
Comme en 2020 , la France est le pays européen ayant le mieux résisté. Le recul du RevPAR par rapport à 2019 est de l’ordre de 48 % au Royaume-Uni, de 63 % en Allemagne, de 72 % aux Pays-Bas, tandis que la baisse dépasse les 50 % en Grèce, Espagne et Italie.
Cette résilience tricolore s’explique par un tourisme domestique solide – l’été a été porteur , sauf pour Paris et les capitales régionales -, et la persistance d’un courant d’affaires de la part de certaines clientèles professionnelles : BTP, PME, cabinets de conseil, actifs indépendants. S’y est ajoutée l’organisation de petits séminaires et de sessions de formation.
A contrario, le manque de visiteurs étrangers – touristes et voyageurs d’affaires – a encore pesé, en particulier pour les clientèles à forte contribution venant de pays lointains.
De forts contrastes
Tous ces éléments participent aux forts contrastes selon les régions et les destinations mais aussi les segments hôteliers. Des différences déjà constatées en 2020. Ainsi, l’amélioration des performances hôtelières est à l’inverse de la classification. Avec un taux d’occupation (TO) moyen de 32,5 %, le segment haut de gamme/luxe, très dépendant du tourisme international – loisirs et affaires – accuse encore, à la fin 2021, le plus fort recul par rapport à 2019, soit 40,6 points, selon MKG, celui du « super économique » étant le plus bas, à 16,4 points, avec un TO de 50,4 %.
Les régions ont mieux résisté, une fois de plus, que Paris, plombé par un tourisme international en berne , ses hôtels de luxe étant les premiers à en souffrir. Le taux d’occupation dans la capitale reste le plus bas, à 34,8 %, soit un écart de 45,5 points par rapport à 2019. De même, le retard reste considérable en termes de recette unitaire, à -62,5 %.
A l’inverse, le Grand Ouest confirme profiter du tourisme domestique et de l’attrait du littoral. La Bretagne pourrait même être qualifiée de gagnante de la crise sanitaire. A la fin 2021, elle est la région dont les performances hôtelières sont les plus proches de 2019 : -16,7 % en RevPAR et -14,2 points en fréquentation.
Cassure nette
Outre Paris, certaines grandes agglomérations ont été pénalisées par le manque de clientèles étrangères et l’annulation de manifestations professionnelles. Même si le maintien des événements à l’automne a été précieux.
La dernière vague du variant Delta et l’arrivée brutale d’Omicron ont toutefois cassé net courant décembre l’amélioration de l’activité observée depuis septembre. 2021 s’est terminé dans la morosité et 2022 a débuté dans l’atonie, avec une visibilité nulle. Bien des hôteliers parient désormais sur un redémarrage en mars ou en avril.
Beaucoup s’inquiètent, plus que jamais, du remboursement des prêts garantis par l’Etat. L’éventualité d’un étalement sur dix ans au lieu de six, récemment annoncée, ne rassure pas, les hôteliers redoutant de voir leurs entreprises cataloguées en défaut.
Ils soulignent le risque d’obérer leur capacité d’investissement. « Cela paraît compliqué de rembourser et d’investir dans l’hôtellerie verte, la RSE, comme nous y invitent les pouvoirs publics », résume le directeur général du groupe Sogepar (26 hôtels en province et un à Paris), Loïc Giroud.
L’évolution du produit hôtelier est d’autant plus de mise que la crise sanitaire a amplifié la convergence entre usages professionnels et loisirs. Dans ce mouvement d’« hybridation », de « bleisure » (contraction de « business » et de « leisure »), les lobbys deviennent des espaces à vivre où l’on peut aussi travailler, les bars et restaurants se tournent vers l’extérieur.
Article de Christophe Palierse – A retrouver en cliquant sur Source