Heineken s’angoisse pour la santé des bars et des cafés
Le brasseur néerlandais a gagné des parts de marché dans les linéaires en France depuis le début de l’année, mais a beaucoup souffert de la fermeture des cafés, explique son dirigeant pour la France. Heineken estime que ses performances en magasin ne compenseront pas les pertes ainsi subies.
Le Covid a cassé l’ élan de Heineken, premier brasseur en France. « Nous réapprenons à marcher avec une jambe plus forte que l’autre, mais la reprise est difficile », dit Pascal Gilet, le PDG. Il estime d’ores et déjà que les pertes subies avec la fermeture des cafés et restaurants ne seront pas compensées par ses performances en magasin. Et anticipe une perte de rentabilité sans la chiffrer.
Le marché en grandes surfaces a été très dynamique, mais sa progression (+6 % en volume, +11,4 % en valeur à fin août selon IRI) ne gommera pas la chute de la consommation hors domicile (-40 %) mieux valorisée, selon le brasseur. Le groupe néerlandais a arrêté la production pour les bars à certains moments et s’est concentré sur la grande distribution. Ce qui lui a permis de gagner des parts de marché sur la période en GMS (+0,8 % en volume). Le groupe confirme sa place de leader avec 33 % des volumes devant Carlsberg (27 %) et ABInBev (17 %).
Gros packs
A ce jour, Heineken estime que 8 % de ses clients hors domicile n’ont pas rouvert, et redoute qu’ils soient plus nombreux au cours des mois à venir. Selon certaines estimations, les faillites pourraient concerner 15 % d’entre eux. Les conséquences risquent d’être lourdes, car au cours d’une année « normale » comme 2019, le hors domicile pèse aussi lourd dans son chiffre d’affaires en France que les ventes en GMS, soit 900 millions d’euros pour sa division dédiée France Boissons et 900 millions d’euros dans les linéaires.
Le brasseur estime avoir bénéficié de la notoriété de ses marques en grandes surfaces et du lancement de nouveaux produits parmi la version sans alcool de Desperados (Virgin), ainsi que les gros packs, bien adaptés aux courses plus espacées. Les ventes de Desperados ont bondi de 23 %, Affligem de 38 %.
La consommation des ménages a été stable pendant la période du confinement, mais elle a fait un bond extraordinaire en juin (+40 %). Heineken est, de toutes les entreprises de grande consommation, celle qui a le plus apporté de chiffre d’affaires additionnel à la grande distribution à fin août, a précisé Pascal Gilet. Le brasseur a encore accru son activité dans le e-commerce et revendique 40 % des ventes de bière sur Internet. Il a doublé son chiffre d’affaires avec Deliveroo.
E-Commerce et services
Ces créneaux font partie des nécessaires pistes d’avenir pour le groupe. Pour la première fois depuis 2014, « on a assisté à une inversion de tendance du marché avec une décroissance des volumes vendus ». « Nous pensons que la crise n’est pas finie. Elle met notre activité à rude épreuve. Il va nous falloir adapter notre mode de fonctionnement », précise Pascal Gilet.
« La croissance des ventes en GMS ne va pas continuer. Le hors domicile va plus ou moins bien se remettre, ce qui nous pousse à capitaliser de plus en plus sur l’offre de services au consommateur et aux enseignes », ajoute le PDG. Le brasseur a amorcé la digitalisation des commandes et des services chez France Boissons. Il collecte les huiles usagées chez ses clients du secteur hors domicile (CHD), ainsi que les emballages de plastique.
Heineken se prépare à une période de « plus grande frugalité », mais juge prématuré d’envisager une restructuration de ses équipes. Les recrutements ont été gelés. A l’échelon mondial, le groupe s’est engagé à ne pas fermer de postes en 2020. Il est tombé dans le rouge au premier semestre , avec une perte de 292 millions d’euros pour un chiffre d’affaires mondial de 9,24 milliards, en baisse de 20 %. La filiale française n’a pas communiqué ses résultats.
Article de Marie-Josée Cougard – A retrouver en cliquant sur Source