Hôtellerie : Vers une reprise plus rapide que prévu

Le cabinet In Extenso montre que l’année passée, les performances de l’hôtellerie française se situaient 37 % en deçà de celles de 2019. Toutefois, cet expert estime qu’un retour à la normale pourrait avoir lieu dès le printemps pour certaines zones, même si à Paris et dans les grandes métropoles françaises, le niveau d’activité de 2019 ne sera pas dépassé avant l’automne.

Les hôteliers ont traversé deux années difficiles, et même s’ils n’ont pas subi de fermeture contrainte, ils ont encaissé des reculs de CA importants depuis le mois de mars 2020.

In Extenso, qui observe mensuellement les tendances de l’hôtellerie en France et en Europe, a publié les résultats de l’activité pour 2021.

Après les chocs de 2020, année durant laquelle l’hôtellerie française a abandonné 55 % de son CA, 2021 marque une relative embellie puisque le RevPar moyen, c’est-à-dire le revenu moyen par chambre disponible ne cède que 37 %, toujours par rapport à 2019, année de référence. Il faut cependant nuancer ce chiffre qui compare dans le temps l’évolution du périmètre général des hôtels de l’Hexagone qu’ils soient ouverts ou fermés. Si on s’en tient au périmètre des hôtels restés ouverts durant ces périodes, la baisse du RevPar est limitée à 30 %.

On peut remarquer que la baisse de fréquentation est l’unique responsable de ce tassement des recettes. La baisse du TO (taux d’occupation) moyen est en effet supérieure à celle du RevPar car les prix moyens ont résisté et affichent même des hausses de 2 à 3 %. C’est une bonne nouvelle pour la profession. Elle signifie que les hôteliers n’ont pas bradé leurs chambres pour attirer à eux la maigre fréquentation.

Cette attitude va permettre un redémarrage plus normal de l’activité, estime Olivier Petit, directeur associé chez In Extenso : « Nous avons craint une guerre des prix, mais les hôteliers ont compris que ce n’est pas en baissant leurs tarifs qu’on attire les clients. Cela aurait été un mauvais signal à envoyer au marché. » Il faut aussi préciser que la résistance des prix moyens s’explique en partie par la disparition de la clientèle groupe qui traditionnellement tire les tarifs vers le bas.

La résilience de l’hôtellerie économique

Le spécialiste de l’hôtellerie n’exclut cependant pas qu’une accélération des promotions puisse accompagner le retour à la normale. Avec la réouverture progressive de tout le parc hôtelier, la compétition s’annonce en effet sévère. Les chiffres généraux de l’année 2021 cachent d’importantes disparités de situations.

En effet, certaines catégories ont pu limiter les dégâts. « L’hôtellerie économique montre une meilleure résilience », note Olivier Petit. Celle-ci voit son recul de CA limité à 21 % (vs 2019) alors que la catégorie haut de gamme et luxe, largement dépendante de la clientèle internationale, perd 47 %. C’est d’ailleurs le segment où beaucoup d’hôtels ont préféré fermer leurs portes en attendant des jours meilleurs. Également très touché, le milieu de gamme abandonne pour sa part 46 % de ses recettes.

De plus, la crise sanitaire a particulièrement affecté l’hôtellerie des grandes métropoles et notamment Paris, où le CA hôtelier s’est affaissé en 2021 de 62 % par rapport à 2019. Les hôtels de province, traditionnellement moins gâtés en termes de taux d’occupation, ont en revanche tiré leur épingle du jeu l’année passée en limitant le recul à 27 %.

L’hôtellerie de la Côte d’Azur, qui est parvenue à sauver l’été, limite de son côté la casse avec – 35 %. Ainsi, un patron d’hôtel économique de province va-t-il avoir une vision beaucoup moins dramatique des conséquences de la crise sanitaire qu’un de ses collègues parisiens exerçant dans le secteur de l’hébergement de luxe.

De fait, Paris et les grandes villes souffrent de la raréfaction de la clientèle internationale, mais aussi du rétrécissement de la clientèle dite Mice (Meetings, Incentives, Conferences and Exhibitions). Comme l’a indiqué Aoife Roche, directrice commerciale de STR, les effets de cette crise sanitaire se font ressentir sur toute la planète, mais « la reprise est plus rapide là où les contraintes sanitaires sont les moins importantes ».

C’est particulièrement vrai en Russie, certaines parties d’Asie ou aux États-Unis. À terme, une levée des restrictions devrait permettre de relancer les voyages d’affaires au niveau mondial. Aoife Roche estime même « qu’à la fin de l’année 2022, l’activité hôtelière mondiale sera rétablie à 90 % ».

Une reprise à portée de main

Il faut rappeler que l’activité hôtelière est particulièrement liée à la situation économique. À ce niveau, les fondamentaux sont solides et les experts d’In Extenso pronostiquent un redressement rapide des taux d’occupation. Ils font d’ailleurs remarquer l’aspect purement sanitaire de cette crise.

À chaque fois en effet que les contraintes sanitaires ont été assouplies, les taux d’occupation des hôtels ouverts sont vite revenus non loin du niveau de leurs performances de 2019. Ce fut particulièrement vrai lors des deux derniers étés, même si Paris n’a pas été en mesure de profiter de cette embellie estivale. De même, les chiffres de l’automne étaient très rassurants.

Dans toutes les régions, les taux d’occupation évoluaient à 10 à 20 points de leurs performances de 2019. Les établissements du littoral ont fait légèrement mieux qu’en 2019 entre septembre et décembre. Malheureusement, l’arrivée du variant omicron a cassé cette dynamique positive. Mais, comme le fait remarquer Olivier Petit, « son effet est de courte durée ».

Ainsi, la province devrait retrouver dès le mois d’avril ses niveaux de RevPar 2019 et les dépasser à partir du mois de juin. Sur la globalité de 2022, en raison d’un mauvais démarrage d’année, le chiffre d’affaires de l’hôtellerie française ne retrouvera pas son niveau de 2019.

Paris plus durablement impacté

Mais les établissements de province et ceux de la Côte d’Azur pourraient naviguer seulement trois points au-dessous de leur niveau de 2019. Paris devrait en revanche rester 10 points en dessous de ses performances de 2019. La capitale devrait en effet connaître un démarrage plus lent et ne retrouver un niveau normal qu’à partir de septembre.

Olivier Petit fait aussi remarquer que la reprise prévue au printemps pourrait être d’autant moins sensible sur le terrain à Paris alors que de nombreux hôtels actuellement fermés pourraient revenir dans le jeu : « Il y aura un accroissement de l’offre et toujours une absence d’une partie de la demande. » La crise sanitaire aura toutefois laissé des traces. Si d’un côté l’hôtellerie s’attend à bénéficier d’un engouement de la clientèle de loisirs, elle ne doit pas s’attendre à une recrudescence des voyages d’affaires.

Les prévisions de ces déplacements sont revues à la baisse par les entreprises, même après un retour à une situation sanitaire normale. Les habitudes prises en matière de réunion à distance vont avoir la vie dure.

En revanche, le télétravail pourrait lui aussi partiellement perdurer et amener une certaine catégorie de salariés à lier travail à distance et loisirs. Mais pour attirer cette nouvelle clientèle, les hôteliers devront proposer des offres adaptées à ces préoccupations.

Source : Vers une reprise plus rapide que prévu