Le basque Biltoki importe à Paris la halle alimentaire de type bodega
Les frères Alaman se sont spécialisés dans la réinvention des halles alimentaires dans lesquelles ils mêlent offre commerciale et restauration dans une ambiance conviviale. Les municipalités et les aménageurs s’y intéressent, comme à Issy-les-Moulineaux à l’ouest de la capitale.
Tous les entrepôts ne se ressemblent pas. Alors que Carrefour prépare l’arrivée en France des gros conditionnements et des palettes à prix discount d’ Atacadao, son cash and carry brésilien, les Navarrais Alaman développent une vision plus conviviale et qualitative des halles alimentaires. Leur concept – Biltoki, entrepôt ou « l’endroit qui rassemble » en basque – arrive dans la région capitale à deux pas de l’ouest Paris sur les quais de la seine, à Issy-les-Moulineaux.
La halle Biltoki s’insère dans un nouveau quartier de bureaux entre le siège d’Orange et celui d’une mutuelle dans un bâtiment Eiffel qui abrita une fabrique d’ampoules au XIXe siècle, puis la Métallurgie franco-belge et, plus près de nous Jacques Séguéla dans son agence Euro RSCG et les services parisiens d’Yves Rocher. Le lieu s’étend sur 1.500 mètres carrés. Il accueille depuis quelques jours 20 artisans et commerçants de bouche.
Echange
Le site a été entièrement rénové à l’occasion de la construction du siège d’Orange par la foncière Altarea (qui a revendu les murs au Crédit Agricole). Le bâtiment de 100 mètres de long et 11 mètres de haut, totalement vitré, a été démonté, désamianté, déplombé et légèrement déplacé. Trois ans de travaux à partir de 2017. Biltoki le loue à Orange et le sous-loue aux commerçants. La société basque a gagné un appel d’offres contre le groupe Bertrand associé à Thierry Cotillard, l’adhérent Intermarché d’Issy-les-Moulineaux.
« Biltoki a vocation à créer des lieux commerciaux de vie et d’échange » résume le jeune (36 ans) directeur général et fondateur Romain Alaman qui travaille avec ses deux frères et un cousin. La fratrie a démarré dans la promotion immobilière au Pays basque, un secteur vers lequel un père maître d’ouvrage et une mère agent immobilier l’avaient dirigée. Leur cinquième, à Anglet, comprenait un vaste local au rez-de-chaussée qu’ils ont eu l’idée d’occuper avec un marché couvert. C’est ainsi que sont nées les halles Biltoki en 2015. Le succès aidant les frères Alaman ont abandonné l’immobilier pour se spécialiser dans les marchés couverts.
Le concept Biltoki mélange commerçants, traiteurs et restaurants.DR
Au fil des ans, ils en ont ouvert deux à Bordeaux (un troisième en en cours), une à Toulon, une à Saint-Etienne, une à Lille, une autre à Rouen. Angers va suivre. De nombreux projets sont montés en partenariat avec des collectivités locales qui veulent redynamiser leur centre-ville ou des nouveaux quartiers, comme à Toulon ou Angers .
Biltoki se repose sur des commerçants locaux et mélange commerce et restauration. « Nous essayons de tendre au 50/50 en termes d’activité mais parfois la balance penche d’un côté, parfois de l’autre. Notre objectif est de créer une ambiance avec des gens qui viennent faire leurs courses le matin ou l’après-midi et d’autres qui viennent déjeuner ou passer un moment le soir » raconte Romain Alaman qui reçoit depuis son arrivée à Paris une demande de municipalité par jour.
Café central
A Issy-les-Moulineaux, le site est inscrit dans une zone de chalandise primaire riche de 60.000 personnes. « Mais nous fonctionnons aussi avec 3.000 » affirme le directeur général. Biltoki exploite toujours en propre le café central de chaque halle, une façon de vivre économiquement avec le projet. Les cafés représentent 40 % du chiffre d’affaires de la société Biltoki (13 millions d’euros) à côté des loyers. Au bord de la Seine, grâce au trafic du tramway et du RER voisins, le volume d’activité est attendu à 11 millions d’euros.
La halle Biltoki d’Issy-les-Moulineaux ouvre jusqu’à 22 heures.
La halle est ouverte de 9 heures à 22 heures tous les jours (elle ferme à 15 heures le dimanche). Les frères Alaman veillent à la cohérence des lieux avec un directeur artistique qui autorise tout ce qui met les produits en valeur. A Issy-les-Moulineaux les stands trônent au milieu de 236 places assises partagées. Les clients s’assoient où ils veulent.
Avec un environnement de bureaux très dense, la pause déjeuner et la pratique des « afterworks » vont certainement pousser la restauration. D’autant plus que l’offre commerciale de produits est moins riche que celle d’un marché ordinaire avec un seul boucher, un charcutier, un boulanger, un pâtissier, un poissonnier, etc. Seuls les traiteurs offrent un choix varié. La halle Biltoki risque de tourner à la bodega.
Par Philippe Bertrand – A retrouver en cliquant sur Source