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Le boom des repas livrés bouleverse les restaurants américains

Pour les restaurateurs, la livraison à domicile a longtemps été un bonus permettant d’amortir les frais de personnel et le loyer. Mais pour certains, il devient nécessaire de dédier de nouveaux locaux à la seule livraison, avec un circuit de fabrication optimisé. Les opérateurs de cuisines partagées – et les modèles – se multiplient. Le fonds souverain saoudien a donné 400 millions de dollars à Travis Kalanick, le fondateur d’Uber, pour développer des restaurants sans salle ni serveur.

 

Selon le cabinet LEK, le chiffre d’affaires des restaurants « en dur » a progressé en moyenne de 4,7 % par an entre 2011 et 2018 tandis que celui de la livraison bondissait de 10,7 %.

Qui a dit qu’un restaurant devait avoir une salle, des tables et des serveurs ? Depuis l’irruption des applications de livraison de repas à domicile, le métier de restauration voit ses contours s’estomper. Travis Kalanick ne s’y est pas trompé. Le fondateur d’Uber est en train de se reconvertir dans les restaurants virtuels, aidé par une manne saoudienne. Le fonds souverain d’Arabie saoudite a injecté 400 millions de dollars dans CloudKitchens, un spécialiste des restaurants « fantômes », affirme le « Wall Street Journal ». CloudKitchens serait déjà valorisé quelque 5 milliards de dollars…

Sur Vandam Street au sud de Manhattan, Zuulkitchens n’en est pas encore là. Depuis un mois, l’ancien entrepôt à la façade repeinte en gris accueille les cuisines de plusieurs enseignes locales de restauration comme Sweetgreen ou Junzi, qui ont dû pousser leurs murs pour répondre au boom de la livraison de repas à domicile ou au bureau.

Co-cooking

Après le co-working dans les immeubles de bureaux de la ville, le « co-cooking » s’installe à New-York comme dans plusieurs grandes villes américaines. Selon le cabinet LEK, le chiffre d’affaires des restaurants « en dur » a progressé en moyenne de 4,7 % par an entre 2011 et 2018 tandis que celui de la livraison bondissait de 10,7 %. Et la croissance des livraisons devrait encore accélérer (entre 13 et 23 % par an jusqu’en 2023, selon LEK), devenant le premier moteur du secteur. La National Restaurant Association  prévoit un chiffre d’affaires de 1.200 milliards de dollars en 2030 contre 863 milliards cette année.

Pour les restaurateurs, la livraison à domicile a longtemps été un bonus permettant d’amortir les frais de personnel et le loyer. Mais pour certains, il devient nécessaire de dédier de nouveaux locaux à la seule livraison, avec un circuit de fabrication optimisé et une division du travail. « Chaque marque dispose de sa propre cuisine et travaille avec son équipe. Nous, nous avons du personnel sur place pour nettoyer leurs ustensiles de cuisine, transporter la nourriture de leur cuisine jusqu’au centre d’expédition à l’avant, et gérer le centre d’expédition où nous agissons comme un intermédiaire entre les marques et les livreurs », explique Corey Manicone, le fondateur de Zuulkitchens.

Chercher de nouveaux clients

Les opérateurs de cuisines partagées – et les modèles – se multiplient.  Outre Travis Kalanick et CloudKitchens , il y a Kitchen United, créé il y a deux ans à partir d’un collectif de chefs cuisiniers, qui vient de lever 40 millions de dollars, notamment auprès de l’opérateur immobilier RXR Realty. Et le spécialiste de la livraison DoorDash vient d’ouvrir sa première cuisine partagée en Californie.

Les cuisines partagées doivent aussi permettre d’aller chercher de nouveaux clients, selon leurs promoteurs. Mi-octobre, le spécialiste de la livraison Uber Eats a lancé dans une quinzaine de villes américaines une opération pour diffuser les recettes d’une chef médiatique, Rachael Ray. Pour desservir ces villes le temps d’une opération spéciale de quelques mois, Uber Eats a notamment fait appel à Reef Kitchens, dont les cuisines sont installées dans des sortes de containers mobiles.

« Nous sommes le premier opérateur de parkings en Amérique du Nord et notre stratégie est d’en faire des hubs d’activité pour les gens qui vivent et travaillent autour », explique Alan Cohen, le directeur marketing de Reef Kitchens. « Les gens veulent leur plat rapidement, chaud et frais. Ce n’est donc pas la livraison au dernier kilomètre mais au dernier block d’immeubles », explique-t-il. Certains s’inquiètent toutefois des marges réduites qui resteront pour le restaurateur, une fois les redevances payées pour la cuisine et la livraison.

Source : Le boom des repas livrés bouleverse les restaurants américains | Les Echos