«Les consommateurs trouvent un nouvel équilibre» : les Européens sortent moins au restaurant, mais leur addition grimpe
Pour Jochen Pinsker, expert Europe chez Circana, «l’après-Covid a provoqué une réorganisation profonde des habitudes de consommation, les consommateurs trouvent un nouvel équilibre». Alberto Marrupe / stock.adobe.com
Selon Circana, les dépenses hors domicile ont atteint 340 milliards d’euros en 2025 dans les cinq grandes économies, un record. Pourtant, la fréquentation a reculé de 10% par rapport à 2019, sous l’effet du télétravail, de l’inflation et de nouvelles pratiques comme la livraison ou le repas seul.
Ils sortent moins, mais dépensent davantage. Depuis la pandémie de Covid-19 et la flambée des prix, les Européens ont profondément modifié leur rapport à la restauration. Les repas d’affaires se font plus rares, la pause déjeuner au bureau a perdu de son importance avec le télétravail et la sortie au restaurant devient un moment plus occasionnel, mais aussi… plus onéreux. Résultat : les additions s’alourdissent, alors même que la fréquentation recule.
Les chiffres donnent le tournis, mais cachent une réalité contrastée. En Angleterre, Allemagne, France, Italie et Allemagne, la restauration hors domicile enregistre en 2025 un chiffre d’affaires inédit de 340 milliards d’euros, selon une étude de Circana. Soit 10% de plus qu’avant la pandémie. Mais derrière cette hausse, un autre indicateur inquiète : les visites ont chuté de 10% depuis 2019, passant de 57,2 à 51,2 milliards.
Pour Jochen Pinsker, expert Europe chez Circana, «l’après-Covid a provoqué une réorganisation profonde des habitudes de consommation, les consommateurs trouvent un nouvel équilibre». Le télétravail a réduit les déjeuners pris à l’extérieur, tout comme la baisse des voyages d’affaires. À cela s’ajoutent des arbitrages budgétaires liés à l’inflation. Les sorties se font ainsi plus rares, mais le ticket moyen grimpe, aux alentours de 30 euros.
Pour contenir la facture, 33,7% des repas incluent désormais une promotion ou un menu, contre moins de 30% il y a trois ans. Les clients se tournent aussi davantage vers l’eau du robinet, dont la consommation a bondi de 5% en 2025.
Le boom du repas solo
Ce recul n’est pas uniforme. Le Royaume-Uni enregistre la plus forte chute (-21% de fréquentation entre 2019 et juin 2025), suivi de l’Allemagne (-13%), où le retour du taux normal de la TVA sur la restauration a durement frappé le secteur. À l’inverse, l’Espagne et l’Italie s’en sortent mieux (-4%), portées par une culture de la pause déjeuner à l’extérieur et un taux de télétravail plus faible. La France, avec -9%, se situe quant à elle dans la moyenne.
Parmi les tendances qui émergent, le repas pris seul s’impose. Près de 16% des visites dans les restaurants à table concernent aujourd’hui des clients venus sans compagnie, contre moins de 10% en 2016. Les dépenses consacrées à ces repas pris seuls ont également bondi de +153% entre 2010 et 2019. «Les restaurateurs doivent désormais composer avec ce phénomène et repenser leur accueil», observe Jochen Pinsker dans l’étude.
Par ailleurs, la livraison poursuit sa progression : dans deux cas sur trois, elle remplace un repas qui aurait été cuisiné à domicile. Les plateformes comme Uber Eats, Just Eat ou Deliveroo pèsent désormais 3,7% de l’ensemble des «visites», soit quatre fois plus qu’il y a dix ans.
Dans l’Hexagone, la profession a multiplié les signaux d’alerte depuis l’été. Emmanuel Macron a d’ailleurs reçu des chefs et représentants du secteur lundi 29 septembre pour évoquer leurs difficultés. Car si la fréquentation reste inférieure à son niveau d’avant-crise, les attentes des clients, elles, se transforment. Pour Circana, il est clair que «les consommateurs trouvent un nouvel équilibre entre plaisir et prix abordable, santé et commodité, occasions sociales et repas en solo.»«Qu’il s’agisse de tapas entre amis à Madrid, de sushis dans un café berlinois ou de cocktails sans alcool à Londres», les consommateurs adaptent désormais «leurs habitudes alimentaires à leur mode de vie, et non l’inverse.»
Par Alix Lavoue – A retrouver en cliquant sur Source