
Les dark kitchens, état des lieux et perspectives, selon François Charpy
Le raz-de-marée des dark kitchens et la rapide mutation de ce modèle, interroge sur leur rôle présent et à venir dans le périmètre de la restauration hors domicile. Dans ce premier volet, François Charpy, expert de la restauration partage avec snacking.fr, son point de vue sur celles qu’on nomme dark, cloud, ghost kitchens ou encore cuisines fantômes… même si les principaux acteurs en réfutent le terme. Cet ex-dirigeant de France Boissons, Quick, Steak‘n Shake ou Disneyland Paris, est aujourd’hui fondateur de Food Strategy & Performance, structure de conseil en stratégie de marketing, transformation, développement, franchise et amélioration des performances commerciales ou financières de l’écosystème F&B et restauration. Les dark kitchens, épisode 1.Les dark kitchens se multiplient et transforment l’écosystème de la restauration ? Quelle est votre position ?
Tout d’abord, contrairement à certaines prises de position, les dark kitchens font partie à part entière du monde de la restauration et le fait que des chefs reconnus comme Pierre Sang Boyer (Deliveroo Editions) ou Greg Marchand (OFC) y recourent en est la démonstration. Certains opérateurs sont issus de la restauration traditionnelle comme Jean Valfort (Devor). Ce modèle, s’il prend de l’ampleur actuellement au niveau international (des études de marché projettent le marché américain à plus de 50Mds de dollars), n’est pas nouveau car je rappelle que Frichti en France a été créé il y a 6 ans et que Deliveroo a ouvert sa première dark kitchen à Londres en 2017. La crise du Covid-19 n’a été qu’un accélérateur, un révélateur d’attentes consommateurs profondes. Cette offre de restauration est complémentaire de la restauration traditionnelle et ne fonctionne pas sur la même chaîne de création de valeur, ni ne délivre la même expérience client. Dark kitchen, ghost kitchen, cloud kitchen, concrètement de quoi parlons-nous ? De restaurants sans salle, sans interaction physique avec le client, axés sur la livraison via les agrégateurs ou une flotte dédiée. La localisation d’une dark kitchen ne suit pas les critères de la restauration traditionnelle où la visibilité et le flux naturel devant l’établissement sont fondamentaux. La densité de la zone de chalandise au sein d’un isochrone de livraison est le facteur clé de réussite. Les produits sont soit des recettes issues de restaurants existants soit des Digital Natives Brands, développées pour ce modèle. Par contre, les recettes doivent avoir été développées ou adaptées pour la livraison car tous les produits ne se transportent pas. Point de copier/coller ni de zones de livraison trop vastes sous peine de déception qualitative pour les clients.
Pourtant toutes les dark kitchens n’opèrent pas sur le même modèle ?
Non, le panorama de l’offre disponible est large et peut paraître complexe. Néanmoins, pour simplifier, il est possible d’identifier 2 types principaux de dark kitchens : les immobilières et les opérationnelles. Les dark kitchens immobilières (Cloudkitchen, Karma kitchen, Reef, Deliveroo Editions) louent des cuisines partagées ou privatisées clefs en main avec ou sans personnel à des restaurateurs. En outre, elles offrent du facility management (réception des livraisons, stockage, nettoyage, entretien, gestion des déchets, plateforme tech de commande). Cette solution permet une mise en œuvre rapide (recherche emplacement) et à coûts réduits (loyers/construction/équipement, staffing service) pour de nouveaux concepts ou une expansion géographique d’une offre existante. Reef aux USA proposent plus de 300 cuisines dans plus de 200 villes.
Les dark kitchens opérationnelles exploitent directement l’intégralité de leur activité dans leurs cuisines avec leur personnel et leurs recettes. Elles sont soit mono-marques (Napoli Gang, l’offre pizza 100 % livraison de Big Mamma, Seazons sur abonnement, Frichti avec en complément une offre épicerie, Food Chéri pour le déjeuner) soit s’apparentent à des foodhalls digitaux commercialisant un portefeuille de marques virtuelles centrées principalement sur le street food, la comfort food (7 chez Devor dont FatFat, Holychick, Saint burger, Squeeze). Rebel Food opère plus d’une vingtaine de marques dans plus de 450 cuisines en Asie.
Mais les dark kitchens ne sont pas uniquement réservées aux marques digitales. Le modèle de « reversed Franchise » permet à des marques existantes de se développer sur de nouvelles zones de chalandises ou à l’étranger en confiant l’exploitation à des opérateurs qui produisent selon les spécifications de la marque. En contrepartie, les marques sont rémunérées par un fee comme dans un système de franchise. Il s’agit d’expansion territoriale digitale de marques nationales ou internationales. A titre d’exemple, Kitopi avec ses 60 cuisines est le partenaire de plus de 200 marques (dont Papa John’s, Shake Shack, Nathan’s, Jolibee) principalement au Moyen-Orient. Aux USA, REEF développe Wendy’s en complément du réseau physique de l’enseigne. En France, OFC (ex Smart kitchen Group) déploie dans ses cuisines un véritable foodhall digital avec des marques comme NYP, Frenchie to Go, Matsuri. L’intérêt de ces foodhalls digitaux pour les clients est de pouvoir permettre de commander plusieurs offres en même temps avec une livraison unique ce qui n’est pas le cas à date chez les agrégateurs et pour les marques partenaires des opérations de cross sampling.
Un nouveau type de dark kitchens, les « host kitchens » se développe. De quoi s’agit-il ?
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Source : Les dark kitchens, état des lieux et perspectives, selon François Charpy