Les recettes de Nestlé pour repartir à l’offensive dans le café
Nestlé est leader mondial sur le marché du café. En Europe, il détient près de 20% du marché du café en portions (dosettes, capsules…). Nestlé
Le leader mondial veut faire croître plus rapidement ses ventes, dans un marché très concurrentiel et pénalisé par la flambée des cours.
Du café froid, un expresso, un cappuccino, du chocolat chaud ou un latte onctueux d’un clic chez soi. Cette semaine, Nestlé a lancé en grande pompe à Paris (la France est le pays fer de lance en Europe pour les innovations) une campagne de communication européenne pour sa machine Dolce Gusto Neo. Lancé il y a deux ans après six années de développement, le système permet de faire tout type de café et de boissons chaudes à la maison, grâce à différentes dosettes. Le tout pilotable d’un bouton, ou depuis son smartphone.
Dolce Gusto Neo doit aider le leader mondial de l’agroalimentaire à repartir de l’avant sur un marché européen du petit noir «très concurrentiel et où nous ne pouvons pas nous contenter de simplement maintenir notre part de marché», explique Mélanie Brinbaum, directrice marketing de Nestlé pour l’Europe. Détenant 19% du marché européen des capsules, Nestlé reste de loin le numéro un du café en général. Mais la concurrence de nouvelles formes de consommation – notamment celle du café en grains dans les pays matures -, les effets de l’inflation alimentaire de 2022 et 2023 et les sous-investissements marketing du groupe au sortir du Covid, ont cassé la dynamique de cette division qui pèse plus d’un quart de l’activité du groupe (26,4 milliards de francs suisses de chiffre d’affaires).
Bien que les cours mondiaux du grain aient doublé en deux ans, la consommation de café continue de progresser dans le monde. Nestlé entend bien repartir à l’offensive dans cette catégorie phare. Lors des neuf premiers mois de l’année, les ventes de ses cafés et boissons chaudes au niveau mondial ont certes grimpé de 7,5%. Mais cette croissance est due, quasiment exclusivement, aux hausses de prix qui ont été passées pour compenser la flambée des cours du café. En France, sa part de marché sur le café en portion a légèrement régressé, sur un an.
Trois marques milliardaires
«Notre ambition est d’accélérer la croissance de nos volumes et de mieux assumer notre place de leader européen, et évidemment mondial», résume la dirigeante. Sous la houlette du nouveau patron, Philipp Navratil, désireux d’accélérer les efforts marketing impulsés par son prédécesseur Laurent Freixe, Nestlé va augmenter de 40% ses investissements marketing et publicitaires pour le système Neo en Europe. Le groupe le fait plus globalement pour la trentaine de ses marques phares, dont 8,5% des ventes seront réinvesties en soutien publicitaire.
«Nous avons trois marques milliardaires (dégageant plus d’un milliard d’euros de chiffre d’affaires, NDRL) dans le café – Nespresso, Nescafé et Starbucks – pour lesquelles nous n’avons peut-être pas assez pris la parole, notamment sur les innovations, reconnaît Mélanie Brinbaum. Au vu du démarrage de Nescafé Dolce Gusto Neo, dont les ventes de machines doublent tous les ans en France, il était évident que cela pouvait être une plateforme de croissance majeure.»
Nestlé y voit un moyen de répondre aux nouvelles habitudes de consommation, alors que le classique petit noir ou l’allongé sont moins prisés des jeunes générations. « Les chaînes de café (Starbucks, Costa…, NDLR) ont créé de nouveaux usages, en proposant des cafés plus lactés, plus aromatisés et avec plus de gourmandise», explique la dirigeante. Une profusion de recettes que la machine Dolce Gusto Neo veut apporter partout. La gamme Dolce Gusto
«Plus que la fréquence d’achat, il faut se reconcentrer sur l’élargissement de notre présence dans les foyers», renchérit Mélanie Brinbaum. Rien qu’en France, plus de 5 millions d’entre eux sont équipés de l’appareil historique de Dolce Gusto (sur le Vieux Continent, la gamme pèse 1 milliard de chiffre d’affaires). La principale difficulté est de se faire une place à côté des autres appareils : en France, 27% des foyers possèdent au moins deux machines pour le café (filtres, capsules, grains….).
Reflux des cours mondiaux
Certes, les capsules en papier de Neo sont en moyenne 10% plus chères que leurs homologues en plastique. «Mais si le goût est au rendez-vous, on voit que l’écoconception est un argument qui porte auprès des consommateurs», estime la directrice marketing. Le groupe s’est aussi astreint, pour sa gamme Dolce Gusto, à ne pas bouger ses tarifs depuis deux ans, pour ne pas faire fuir les clients, quitte à prendre sur ses marges. Le récent reflux des cours mondiaux de l’arabica et du robusta pourrait l’aider à faire baisser les prix de ses différents types de café en rayons. Sachant qu’en France, le tarif moyen à la tasse d’un café – tous circuits et marques – est passé de 10 centimes en janvier à 12 centimes actuellement.
En outre, le groupe a inclus dans ses dernières machines un système de lecture automatique des capsules, lui permettant de passer au crible la consommation de ses clients. Un moyen d’élargir à terme la gamme de boissons proposées. Car à domicile comme dans les cafés et restaurants, les habitudes de consommation évoluent rapidement.
Nestlé, inventeur du café portionné avec Nespresso, et poids lourd du soluble, s’est toujours refusé à prendre la vague du café en grains, vendu moins cher. Ces formats ont pourtant atteint plus de 15% de part de marché dans certains pays comme la France. «Concernant les machines à grains, c’est une tendance qui stagne, estime Mélanie Brinbaum. D’abord car le consommateur ne s’y retrouve pas en termes de goût, mais surtout car les plus avertis savent qu’en termes d’impact environnemental, le café en grains est loin d’être aussi vertueux qu’on le pense.»
En revanche, le géant suisse ne compte pas manquer la vague du café froid, qui représente désormais une tasse consommée sur cinq dans le monde. Notamment aux États-Unis, où il s’apprête à devoir contrer les offensives de Keurig, qui vient de racheter les marques mondiales Peet’s, Jacobs et L’Or. Après avoir lancé ses concentrés de café Nespresso froids aux États-Unis, en Asie et en Australie, Nestlé les teste en Europe, via le Royaume-Uni. La gamme sera lancée en France en 2026. Le groupe a également lancé des canettes sous ses marques phares Nespresso et Starbucks.