Livraison : Une affaire qui roule ?

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L’effet « attentats » avait boosté la livraison en 2016. La Coupe du monde de football aussi, en 2017.
Et aujourd’hui, où en sommes-nous en 2018 ? La tendance s’est-elle bel et bien installée ? Ou les Français vont-ils retourner dans leurs restaurants favoris ? Cette fin d’année, avec ses quelques surprises, est une occasion idéale pour faire le point sur ce marché qui concerne directement votre activité. Et nous nous sommes entourés, pour ce faire, des meilleurs experts. À vos marques, prêts, feu, partez !

Dossier réalisé par Anthony Thiriet, avec Marie Frumholtz et le cabinet Food Service Vision

Un dossier réalisé avec…

François Blouin, président-fondateur de Food Service Vision, et Florence Berger, consultante senior pour ce même cabinet d’études.

Food Service Vision est le leader du conseil et des études en consommation hors domicile en France. Ce cabinet  » /> accompagne les groupes, chaînes de restauration et ensembliers, en France et à l’international, dans leurs plans de croissance et leur repositionnement stratégique. Il est partenaire de longue date de B.R.A. Tendances Restauration. ♦ www.foodservicevision.fr
Francis Luzin, fondateur des Éditions de la RHF, qui éditent ce magazine, et François Blouin, fondateur de Food Service Vision, ont créé Food Service Factory. Il s’agit du 1er « accélérateur de start-up digitales » dédié au marché de la Restauration Hors Foyer en France. Sa mission est d’accompagner les leaders du marché dans leur transformation digitale, en les connectant avec des start-up innovantes et talentueuses. ♦ www.foodservicefactory.fr
Vous voulez faire du digital un levier de croissance de votre business ? Contactez Florence (f.berger@foodservicevision.fr) ou François (f.blouin@foodservicevision.fr).

La livraison s’est grandement développée ces 3 dernières années dans le secteur de la restauration en France, le dynamisant pour certains, le bousculant et le dérangeant pour d’autres. Elle dépasse en tout cas largement les segments historiques de la pizza et du sushi, tous les types de repas pouvant être livrés, grâce notamment aux agrégateurs et à la popularisation des smartphones. En scooter, à vélo et même en roller, les livreurs animent nos rues, et parviennent à étendre les zones de chalandise des restaurateurs. Ces derniers profitent aussi d’une belle visibilité et voient leurs chiffres d’affaires augmenter. Quel beau tableau !
Mais si l’activité « livraison » a ses bénéfices, elle a aussi ses difficultés et ses problèmes. Certains acteurs font déjà banqueroute, d’autres cherchent à se renouveler, et les restaurateurs ne sont plus aussi convaincus qu’avant par la sous-traitance. Il est temps de mettre tout à plat, et ce en 3 parties :
Quelles sont les pratiques des consommateurs et des professionnels ?
Quels sont les différents modèles présents aujourd’hui sur le marché ?
Quelles sont les prospectives pour ce marché en pleine agitation ?

Les pratiques des convives et des professionnels

Avant de décrypter la structure du marché de la livraison de repas en France, et de comprendre ses répercussions sur les secteurs de la restauration et de l’agroalimentaire, faisons le point sur les tendances et pratiques actuelles. Voici les 5 points essentiels.

1. La livraison de repas est une pratique usuelle pour les consommateurs et un pilier de croissance clé pour les restaurateurs

Aujourd’hui, plus d’1 Français sur 2 se fait livrer des repas, alors que moins d’1 restaurateur à table indépendant

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propose un tel service. « Cette double information nous prouve, d’une part, que la livraison est devenue une pratique courante ; et d’autre part, qu’il y a encore de la place sur ce segment, qui peut véritablement accompagner le développement économique d’établissements de restauration », constate Florence Berger, consultante senior chez Food Service Vision. « La livraison est devenue un véritable nouveau canalconsommation de la restauration », renchérit François Blouin,président-fondateur de ce cabinet de conseils et d’études.

52 % des Français se font livrer à domicile en 2018 *(1)
16 % des restaurants à table indépendants proposent un service de livraison en 2018 *(2)
22 % des restaurateurs, tous types confondus, proposaient la livraison en 2017, en propre et/ou via un agrégateur (3)

*Étude « Restauration Digitale 2018 », Food Service Vision ● (1) Sur 522 consommateurs, « À quelle fréquence vous faites-vous livrer des repas à votre domicile ? » ● (2) Sur 80 restaurateurs à table, « Proposez-vous un service de livraison à domicile ? » ● (3) Étude « Restauration digitale 2017 », Food Service Vision

2. La livraison de repas est un service particulièrement apprécié par les jeunes urbains

Ces données prouvent que les plus adeptes de la livraison de repas à domicile sont les Millennials. « Ils sont naturellement connectés, donc à l’aise avec les applis et autres services en ligne ou digitaux. Comme ils sont souvent faiseurs de tendances et influenceurs, la tendance ne fait que de s’accroître », commente Florence Berger.
L’étude de Food Service Vision confirme aussi que la livraison est essentiellement développée à Paris et dans les grandes villes. « Cette situation devrait être pérenne, la demande n’étant pas assez forte et concentrée en zone rurale pour qu’un acteur de la livraison puisse y enregistrer une certaine rentabilité économique », commente François Blouin.

Parmi les clients de la livraison de repas à domicile…
52 % ont moins de 35 ans
70 % habitent en région parisienne
67 % vivent dans des communes de plus de 100 000 habitants

Étude « Restauration Digitale 2018 », Food Service Vision ● Sur 522 consommateurs, « À quelle fréquence vous faites-vous livrer des repas à votre domicile ? »

3. De plus en plus de grandes villes françaises accueilleront les acteurs de la livraison

de repas
Pour autant, en regardant les villes où sont présents les principaux acteurs de la livraison (voir aussi l’état des lieux ci-dessous), et en songeant à toutes les grandes villes qui ne sont pas encore ou peu concernées, on voit rapidement apparaître un fort potentiel pour ce service en France. « Il est clair que, comme au cours des précédentes années, beaucoup de villes vont accueillir ou voir se développer, à court et moyen termes, les services de livraison de repas… Ce qui modifiera naturellement, dans ces zones urbaines aussi, l’équilibre du secteur CHR », confirme Florence Berger

4. La livraison en direct domine toujours face à celle réalisée par des acteurs spécialisés

Si la livraison réalisée en direct par les restaurateurs reste majoritaire en France, les agrégateurs continuent de s’installer dans le paysage. « Et leur part de marché ne cesse de progresser », relève Florence Berger.

 

 

 

 

Le développement de la livraison dans l’Hexagone est tiré par la demande, mais aussi par l’offre, qui a particulièrement bien stimulé la demande. « L’arrivée de certains acteurs élargit le marché de la livraison, parce qu’ils investissent énormément dans la communication. À travers la mise en avant de leur marque, ils font la promotion globale de ce service encore naissant dans une grande partie de la France », résume François Blouin.

En mai 2018, 43 % des plats livrés l’étaient par des sociétés spécialisées (Uber Eats, Deliveroo, Just Eat…).
Étude « Restauration Digitale 2018 », Food Service Vision ● Sur 522 consommateurs, « Comment vous faites-vous livrer vos repas ? »

5. Le nombre de restaurants proposant un service de livraison pourrait doubler à moyen terme

Food Service Vision annonce qu’1 restaurateur sur 3 pourrait proposer un service de livraison d’ici 3 à 5 ans, contre environ 1 sur 6 aujourd’hui. Le nombre de restaurants concernés va donc continuer d’augmenter. L’étude précise par contre que le développement sera assez mou sur les 2 ans à venir : ceux qui ne sont pas encore lancés devraient mettre un certain temps à le faire.

Globalement, donc, la pratique de la livraison de repas va continuer à s’installer. « Les évolutions dans les équipements et les pratiques (Netflix, Google Home…) rendent le domicile de plus en plus attractif, ce qui participe aussi à l’essor de la livraison », ajoute François Blouin.
Mais ce qui a changé ces derniers temps, et devrait se poursuivre ainsi, c’est que l’on ne peut plus vraiment parler de « la » livraison mais « des » offres de livraison. Elles s’améliorent et sont de plus en plus spécialisées selon les usages, besoins et moments : livraison rapide à domicile, livraison rapide au bureau, livraison par abonnement, etc. « Les services proposés évoluent, et les business models des acteurs de la chaîne de valeur se cherchent… et changeront, eux aussi, pour atteindre leurs objectifs de rentabilité », ajoute le dirigeant de Food Service Vision.

De 16 % actuellement, on pourrait passer d’ici quelques années à 32 % des restaurateurs indépendants avec service à table qui proposeront une solution de livraison de repas. Il y a donc un potentiel de croissance de 16 %.
Sur l’ensemble de la restauration, on pourrait passer de 22 % l’an dernier à 43 % en 2020.

Études « Restauration Digitale » 2017 et 2018, Food Service Vision ● Sur 80 restaurateurs à table, « Si ce n’est pas encore le cas, pensez-vous utiliser à l’avenir ce type de solution ? »

Les différents modèles des acteurs de la livraison

Adieu la livraison, bienvenue aux livraisons ! Il faut, aujourd’hui, parler de ce service au pluriel, vu le nombre et la variété des solutions proposées. Voici les 4 principaux types de modèles actuels, qui sont arrivés dans l’ordre proposé, mais se superposent ; sachant que, comme pour les segments de la RHF, les frontières ont tendance à se brouiller au fil des années.

1. Les restaurants et chaînes de restauration qui livrent eux-mêmes

Certaines enseignes du secteur ont historiquement un service de livraison intégré. C’est surtout le cas sur les segments de la pizza et de la restauration asiatique. Dans ce modèle, le restaurant produit, prend les commandes et livre avec sa propre flotte. « On touche ici l’origine du sujet : ce sont d’abord des restaurants qui ont proposé à leurs clients d’être livrés à leur domicile. Le modèle organisationnel et social était bien différent. Il n’y avait ni Internet, ni smartphone, ni agrégateurs », sourit François Blouin.
Ce fonctionnement n’est toutefois pas abandonné, certaines enseignes et nombre d’indépendants continuant à avoir leurs livreurs, à l’instar de Domino’s Pizza qui refuse de travailler avec des prestataires externes (voir article lié) et du restaurant Wok & Go à La Garenne-Colombes (92) qui livre lui-même dans une dizaine de villes. D’autres acteurs, comme Planet Sushi (voir article lié), décident de marcher sur 2 jambes, en mixant livraison en propre et livraison par prestations.

2. Les agrégateurs de restaurants proposant déjà un service de livraison

Ces plateformes réunissent des restaurants qui produisent leur offre et assurent sa livraison à leurs clients. Elles référencent et centralisent les adresses et développent leurs commandes de livraison, en n’ayant qu’un rôle de mise en relation et d’apporteur d’affaires. Elles prennent une commission de 10 % à 15 % par commande, mais offrent toutefois aux restaurateurs une présence digitale complète (Internet, application, réseaux sociaux). Les clients bénéficient d’un service client et les restaurateurs d’une assistance, ce qui participe, avec la simplicité du modèle, au succès de ce type de plateforme. « Nous restons ici sur un modèle économique centré sur l’établissement : c’est le restaurateur qui est au cœur de l’affaire et qui envoie les commandes, l’agrégateur n’étant qu’un portail pratique pour les clients finaux », commente François Blouin.

Parmi les acteurs

Just Eat. Ex-Allo Resto, Just Eat est le pionnier et l’acteur national principal sur ce modèle. Historiquement, il ne réunissait que des restaurants qui assuraient eux-mêmes leurs livraisons ; il intègre toutefois, maintenant, un service de livraison. Le groupe se développe surtout avec les chaînes, vecteurs de trafic sur la plateforme. Parmi ses forces, citons les horaires élargis (10h30 à 6h) et la présence nationale : Just Eat réunirait plus de 5 000 restaurants dans plus de 2 000 villes. Le faible coût additionnel est aussi attractif : 0,95 € pour le consommateur.
Chronoresto. Service de Pages Jaunes, Chronoresto fonctionne dans le Grand Paris ainsi qu’à Lyon, Marseille, Montpellier et Strasbourg. Il propose plus de 40 spécialités et facture 0,95 € de frais de gestion. Pages Jaunes a aussi lancé Grood qui invite les mobinautes à se regrouper autour d’une commande, pour en réduire les coûts.
Resto Malin. Créé en 2010 par des Alsaciens, Resto Malin est disponible dans plus d’une centaine de villes en France.

3. Les agrégateurs-livreurs qui apportent aux clients les offres des restaurants

Arrivées en France de manière significative il y a 3 ans (voir les dates clés ci-dessous), ces places de marché assurent le service de livraison entre les restaurateurs et les clients. Elles facturent aux professionnels 25 % à 30 % du CA, en tant qu’apporteurs d’affaires mais aussi prestataires de missions de livraison. Ces dernières sont surtout effectuées à vélo (ou scooters), la plupart du temps par des auto-entrepreneurs.
Dans ce modèle, le restaurant ne s’occupe que de la production. Il profite d’une mise en avant de sa marque à travers ces plateformes aujourd’hui renommées, qui sont des portails de plus en plus exhaustifs. « Le choix proposé par chaque opérateur explose, tant en quantité de restaurants qu’en types d’offres. Ces plateformes présentent aussi l’avantage d’avoir des moteurs de recherche puissants avec des filtres répondant aux attentes de la clientèle moderne », commente Florence Berger, avant de relever la problématique des conditions de travail des livreurs freelance. Un sujet favorable aux restaurateurs-livreurs, mais aussi à des coopératives de livreurs, que réunit par exemple CoopCycle (voir article lié).

Parmi les acteurs

Deliveroo. Cette entreprise britannique présente dans 12 pays l’est dans plus de 200 villes en France, avec 6 000 restaurants référencés. 2,50 € la livraison.
Uber Eats. Ce service d’Uber référence plus de 5 000 restaurants dans une trentaine de ville en France dont Paris, Aix, Angers, Bordeaux, Brest, Caen, Cannes, Clermont, Dijon, Grenoble, La Rochelle, Lille, Limoges, Lyon, Marseille, Montpellier, Nancy, Nantes, Nice, Nîmes, Orléans, Perpignan, Reims, Rennes, Rouen, Saint-Etienne, Strasbourg, Toulon, Toulouse et Troyes. 2,50 € la livraison.
Resto-in. Propriété de GeoPost, Resto-in référence plus de 1 000 restaurants dans une dizaine de villes de France dont Paris, Aix, Bordeaux, Caen, Dijon, Lyon, Marseille, Metz et Nancy. La livraison est sous-traitée.
My RestoBox. Présent dans la métropole lilloise, cet acteur a un positionnement biologique et respectueux de l’environnement. Il propose un service à table et un débarrassage.
Stuart. Service de livraisons urbaines, la restauration n’étant qu’une partie de ses activités. Présent dans 15 villes de France. Prestataire d’acteurs comme Just Eat (5 % des commandes).
Glovo. Cet acteur espagnol présent à Paris livre également bien plus que des plats de restaurants (voir article lié).
CoopCycle. Une plateforme alternative regroupant des coopératives de livreurs et souhaitant revaloriser leur travail (voir article lié).

4.  Les restaurants virtuels avec livraison intégrée ou externalisée

Le dernier modèle dans ce business de la livraison de repas, c’est le restaurant dématérialisé, ou « restaurant fantôme », qui ne reçoit pas de client. Son offre est spécialement et exclusivement pensée pour la livraison. Ces concepts sont nés sur la promesse de préparer et livrer des repas de qualité à des prix abordables, grâce à une maîtrise de la production façon traiteur/collectivité.
L’offre proposée est souvent courte, mais certains optent pour plus de choix, toujours en cohérence avec les nouvelles tendances de consommation. La livraison est souvent réalisée par des prestataires, ceux qui l’assurent eux-mêmes pouvant maîtriser la data, donc la relation client.
Chaque acteur positionne son laboratoire et active ses zones de livraison selon la demande. Le modèle est lié à la densité de la zone de chalandise cible, notamment d’actifs, ce qui limit

son déploiement aux plus grandes villes, à commencer par la capitale.
« Ces entrepreneurs ont compris qu’il était possible d’inverser la pyramide de la création de valeur. L’offre est ici conçue pour la livraison, ce qui assure une expérience globale réussie. Ce modèle exclut les charges fixes d’un point de vente accueillant du public. Nous sommes bel et bien dans l’ère de la digitalisation ! » commente François Blouin.
Le client peut pourtant avoir l’impression d’avoir des enseignes réelles. « Les marques sont souvent bien soignées et les concepts bien thématisés. Les clients retrouvent des univers attractifs qui se démarquent les uns des autres. Ils retrouvent un choix semblable à ce qu’ils peuvent avoir en centre-ville ou dans un centre commercial », ajoute Florence Berger.

Parmi les acteurs

Frichti. Du petit-déjeuner au dîner en passant par le brunch et l’apéritif. Plats dès 5,90 € + 1,50 € pour la livraison. Grand Paris.
Food Chéri. Propriété de Sodexo. Repas dès 6,90 € + 1,50 € de livraison. Lancement d’une formule d’abonnement baptisée Seazon. Grand Paris.
PopChef. Environ 10 € le plat et 3 € les desserts et boissons + 2 € pour la livraison. Grand Paris.
Nestor. Menu entrée-plat-dessert unique qui change chaque jour. 15 € livraison express comprise. Grand Paris.
L’Étoile des Gourmets. Livraison de plats semi-gastronomiques, à mi-chemin entre le plat préparé et le kit à cuisiner (de 12 € à 35 €). Dans plusieurs régions de France. Ce service était indisponible en novembre.

Pratique

Des modules de gestion communs

Lorsqu’ils gèrent eux-mêmes la livraison, les restaurateurs et groupes de restauration utilisent la plupart du temps des solutions spécialisées. Parmi elles, LivePepper serait la plus répandue. Un module ajouté au site web de l’enseigne permet au client de passer sa commande de livraison, qui arrive en cuisine et intègre les autres outils de gestion. Bien d’autres solutions existent comme Click Eat, Clicknfood, Easy Restaurant Online, Shoppy Food, Wysifood et Zelty.

Les dates-clés

2015, l’année où tout s’est accéléré !

1998 Lancement d’Allo Resto.
1999 Lancement de Chronoresto.
2006 Lancement de Resto-In.
2010 Lancement de Resto Malin.
2012 Allo Resto intégre Just Eat.
2013 Lancement Take Eat Easy.
Pages Jaunes reprend Chronoresto.
2014 Lancement de L’Étoile des Gourmets.
2015 Lancement de Food Chéri, Nestor, Stuart, My Resto Box, Pop Chef, Le Zeste, Miam Tag, Deliveroo, Uber Eats et Foodora.
2016 Lancement de Glovo, Chaud Chaud Chaud et Frichti qui aspire Le Zeste.
Liquidation judiciaire de Take Eat Easy.
2017 Lancement de CoopCycle.
Reprise de Stuart par La Poste.
Fermeture de Chaud Chaud Chaud.
2018 Retrait du marché français de Foodora.

Et maintenant, et ensuite ?

1. Des disparitions et de l’agitation

Pendant que certaines plateformes arrivent dans de nouvelles villes, d’autres disparaissent. Créée à Munich en 2015,  Foodora a cessé son activité en France en septembre, après y avoir conquis 8 métropoles. Take Eat Easy, dont la croissance était fulgurante, n’aura finalement tenu que 3 ans (de 2013 à 2016). Attablez-vous, Le Zeste (aspiré par Frichti) et Chaud Chaud Chaud font partie des autres disparus.
D’autre part, on apprenait fin septembre qu’Uber était entré en discussion avec Deliveroo pour un potentiel rachat. Selon le Financial Times, un accord financier n’aurait pas été trouvé. Si les négociations n’étaient pas rompues fin novembre, elles semblaient compromises. Notons qu’avant Uber, Amazon avait déjà tenté de se rapprocher de Deliveroo. La concentration des acteurs de la livraison en France pourrait donc se poursuivre, et d’autres pourraient arriver, comme Amazon ou Google.

2. Un vrai feuilleton juridique

Le marché de la livraison en France est frappé par une polémique sur les statuts et rémunérations des coursiers. Cet été, une grogne était montée face à la « tarification aléatoire des courses » instaurée par Deliveroo (de 7 € à 4 € pour 4 km). Et Mediapart a révélé, le mois dernier, qu’une enquête préliminaire avait été confiée par le parquet de Paris à l’Office central de lutte contre le travail illégal (OCLTI) sur les activités de cette entreprise en France.
Autre coup de théâtre, le mois dernier : pour la première fois, la justice a estimé qu’un livreur à vélo devait être salarié. C’est le cas d’un ancien livreur de Take Eat Easy qui a fait mouche. L’entreprise avait instauré un système de bonus et de pénalités. La Cour de cassation a estimé qu’il existait « un lien de subordination » et a évoqué « un pouvoir de direction et de contrôle de l’exécution de la prestation ». En cause notamment, la géolocalisation permettant de suivre le livreur en temps réel, de vérifier son travail et de le sanctionner si besoin. L’inspection du travail et l’Urssaf auraient déjà acté sur le fait que les livreurs à vélo étaient des salariés classiques. Des changements qui pourraient remettre en cause tout le modèle des plateformes de livraison.
Dans une interview à L’Union en avril, Hugues Décosse, directeur de Deliveroo France, expliquait : « Salarier nos livreurs coûterait moins cher, mais on n’aurait jamais réussi à en trouver 10 000 ! » Puis, il ajoutait : « Être salarié, ce n’est pas une attente des livreurs ! »

3. Des modèles qui se mélangent

À l’avenir, les métiers devraient se croiser davantage et les frontières entre les modèles devraient s’effacer toujours plus.
• Deliveroo va par exemple mettre à disposition des professionnels des « cuisines partagées », pour leur permettre de

livrer dans de nouvelles zones. Cette pratique pourrait faciliter le déploiement de concepts virtuels et éphémères. « Demain, un restaurateur indépendant pourra, sans avoir un point de vente, opérer une activation de restauration livrée », pense Florence Berger.
• En parallèle, des restaurants jusque-là virtuels pourraient se mettre à ouvrir des points de vente. « Pourquoi pas ? Leur marketing et leurs offres sont soignés et leur notoriété est souvent forte… Il n’y a donc qu’un pas pour que ces concepts s’installent dans nos rues et centres commerciaux », explique Florence Berger.

4. Une grande ruée vers la data

Pour François Blouin, « nous assistons à la consolidation d’un marché dont la valeur se fait sur la connaissance des clients. Certains acceptent même d’avoir des services non rentables pour tout savoir sur les clients, et lancer des offres plus adaptées. C’est ce qu’il s’est passé sur d’autres marchés comme la téléphonie mobile. »
Le dirigeant-fondateur de Food Service Vision évoque, en outre, l’offensive des GMS : « Ce sont les premiers à perdre directement des clients ! Les grandes et moyennes surfaces vont intensifier leurs offres de livraison de repas prêts à être dégustés. » Et l’expert de conclure : « Tout bouge et il est difficile de savoir dans quel sens nous allons. Ça sera utile de refaire un point dans 1 an ! ».

Source : Livraison : Une affaire qui roule ? – B.R.A. Tendances Restauration