Pernod Ricard préserve sa rentabilité malgré des vents contraires en Chine et aux Etats-Unis

Malgré un net recul des ventes en Chine et aux Etats-Unis, Pernod Ricard maintient sa rentabilité et anticipe une reprise progressive. Le groupe réorganise ses activités et vise un milliard d’euros d’économies d’ici à 2029 pour renforcer son efficacité.

L'entreprise met en garde sur le surplus de stocks, en Chine et aux Etats-Unis, conséquence des taxes douanières.
L’entreprise met en garde sur le surplus de stocks, en Chine et aux Etats-Unis, conséquence des taxes douanières. (Photo Jean Claude Moschetti/REA/ ‘L’abus d’alcool est dangereux pour la santé’)

Pernod Ricard a limité la casse sur son exercice annuel décalé 2024-2025 à fin juin. Avec ses deux principaux moteurs en panne, les Etats-Unis et la Chine, le propriétaire de Martell, Ballantines ou Absolut a vu son chiffre d’affaires reculer de 3 % en données organiques à 10,96 milliards d’euros (-5,5 % en publié).

En volume toutefois, les ventes progressent de 2 %, soit un troisième semestre consécutif de hausse. La perspective d’une reprise des ventes l’an prochain a été salué à la bourse, avec une hausse de 8,5 % du cours dans la matinée. « 2026 sera une année de transition, a souligné Alexandre Ricard, le PDG du groupe, avec une amélioration de l’activité au second semestre. »

Dans un contexte tendu pour le commerce mondial, le groupe a réussi à préserver sa rentabilité. Le résultat opérationnel courant (ROC) du géant des spiritueux a ainsi baissé de 0,8 % en organique (-5,3 % en publié) à 2,95 milliards d’euros. Le résultat net part du groupe, lui, progresse de 10 % à 1,6 milliard « du fait d’une diminution des charges non courantes par rapport à l’exercice 2023-2024 ». La marge opérationnelle en données publiées, malgré des effets de change fortement négatifs, se maintient.

De lourds stocks

Aux Etats-Unis, son premier débouché (19 % des ventes) où l’administration Trump ne devrait finalement pas exempter les vins et spiritueux de taxes douanières, le groupe a vu ses ventes reculer de 6 %. Et ce alors que le marché des spiritueux est lui en légère croissance. « Les incertitudes prolongées concernant les droits de douane ont impacté les niveaux de stocks des distributeurs en fin d’exercice », relève l’entreprise.

En Chine (8 % des ventes), l’activité a plongé de 21 %. Les Chinois, dans un climat économique difficile, ont réduit leurs achats de cognac et de scotch, mais ses marques premium comme Jameson et Absolut sont en forte croissance. « La faible demande consommateur au quatrième trimestre, ainsi que l’anticipation de la fin de l’enquête anti-dumping, conduisent à un surplus de stocks chez les distributeurs en fin d’année », avertit Pernod Ricard. En juillet, le numéro mondial du secteur, ainsi que Rémy Cointreau, et Hennessy ont convenu de maintenir les prix en Chine à des niveaux minimaux, ce qui leur a permis d’être exemptés des droits antidumping. Ces nouvelles mesures devraient amputer les bénéfices de 45 millions d’euros, selon Alexandre Ricard, contre des estimations allant jusqu’à 140 millions d’euros auparavant.

En revanche en Inde, son second marché (13 % de l’activité), les clignotants sont au vert, avec une progression de 6 % des ventes. Jameson est désormais la première marque d’alcool importé dans le pays. Au total, Pernod Ricard a maintenu ou gagné des parts de marché dans 12 de ses 17 principaux marchés.

Pour préserver ses marges, Pernod Ricard va poursuivre une «stricte discipline sur la réduction des coûts». Après un plan de 900 millions d’économies réalisées depuis deux ans, le dirigeant a confirmé jeudi un nouveau programme d’un milliard d’euros d’économie sur 2025 et 2029. Ce qui va passer par une amélioration au niveau opérationnel, avec une réduction des stocks, et une restructuration.

1 milliard d’économie

En juin, le numéro deux mondial a annoncé un vaste plan de réorganisation, qui aura un effet sur l’emploi, non encore chiffré. Le groupe compte quelque 18.500 collaborateurs dans le monde, dont 3.000 en France. Au siège à Paris, 140 postes pourraient être supprimés.

L’activité du groupe jusque-là divisée en six unités, va se regrouper autour de deux piliers, l’un avec les alcools qui vieillissent, cognac, whisky et champagne et l’autre avec le reste des spiritueux, vodka, tequila et autres. L’objectif est de gagner en efficacité et de créer des synergies. « Notre objectif est d’être prêt pour le futur, a insisté Alexandre Ricard, en allant vers plus de simplification et donc d’agilité dans la prise de décision. » Le PDG va engager dans les trois mois un vaste tour du monde pour rencontrer les équipes sur place et discuter de cette nouvelle stratégie.

Une forte innovation

Les investissements en capital et dans les stocks ont atteint un pic en 2024, à 1,2 milliard. Pour l’exercice en cours 2025-2026, le géant des spiritueux va poursuivre les innovations, notamment dans les boissons sans alcool et continuer de soutenir ses marques côté marketing, avec pour priorité les Etats-Unis, où il a du retard sur le marché. Ses marques seront soumises aux droits de douane de 15 % imposés aux produits européens.

Mais avertit le spécialiste des spiritueux, le début de l’exercice sera marqué par un recul des ventes, du fait des réserves de bouteilles chez les grossistes Outre-Atlantique, et des ajustements de stocks en Chine. L’activité duty free de Cognac en Chine, bloquée depuis décembre 2024, devrait-elle se relancer à partir du deuxième trimestre. « Les magasins se sont retrouvés en rupture de stock, mais les entrepôts étaient pleins », a souligné le PDG. A moyen terme pour 2027-2028, le groupe mise sur une croissance du chiffre d’affaires entre 3 % et 6 %, et une progression de la marge opérationnelle.

Par Dominique Chapuis – A retrouver en cliquants ur Source

Source : https://www.lesechos.fr/industrie-services/conso-distribution/droits-de-douane-pernod-ricard-preserve-sa-rentabilite-dans-un-contexte-mondial-tres-chahute-2183125