
« Le maître-mot reste la prudence »
Après huit semaines de fermeture, les quelques 400 restaurants Subway (180 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2019) se mettent en ordre de bataille pour la reprise de l’activité. Le point sur cette réouverture et ce qu’elle change dans la stratégie de l’enseigne avec Cédric Giacinti, directeur général de Subway France. Propos recueillis par Yannick Nodin
Quelle stratégie a été adoptée par Subway France durant le confinement ?
Nous avons, comme beaucoup de monde, vécu au rythme des annonces de mars sur la fermeture des écoles, celle des restaurants puis sur les mesures de confinement. Et comme beaucoup, la fermeture du 14 mars n’a pas été simple à gérer. Poursuivre pendant deux jours ensuite nos activités sur la VAE, le drive et la livraison nous a permis, même si ce n’était pas un grand succès commercial, de réduire au maximum les pertes alimentaires. L’entrée en vigueur des mesures de confinement, le 16 mars, a changé la donne. Les quelques 400 restaurants Subway en France sont pour moi les lieux d’une consommation plaisir, je ne nous ai pas reconnus dans ces commerces essentiels qui ont permis aux Français de s’alimenter depuis huit semaines. Et même si certains de nos restaurants réalisent jusqu’à 40% de leur chiffre d’affaires sur la livraison, nous avons préféré ne pas céder à l’opportunisme, en suspendant entièrement nos activités. Il était important de nous positionner sur cet enjeu en tant qu’enseigne nationale, et de le faire en gardant à l’esprit de limiter au maximum les déplacements individuels, pour sortir au plus vite de la crise sanitaire.
Comment le réseau, exclusivement composé de franchisés, a-t-il réagi ?
La décision de fermer est aussi un acte économique, qui n’a pas été simple à annoncer aux 300 entrepreneurs franchisés Subway en France, d’autant que nous sortons d’un exercice 2019 exceptionnel, avec une progression du chiffre d’affaires de 9% en données comparables, cette dynamique commerciale se maintenant au premier trimestre 2020. L’allocution d’Emmanuel Macron a été de ce point de vue décisive, en permettant à nos franchisés de préserver leur trésorerie, par l’activité partielle, les exonérations de charges, les PGE. En tant que franchiseur, nous avons essayé de maintenir ce principe d’un allègement des coûts de fonctionnement, en renonçant aux royalties de la semaine précédant la fermeture, en accompagnant nos franchisés dans les démarches nécessaires à la protection de leur entreprise, en imaginant aussi des reports d’échéances lors de la reprise d’activité, afin que chacun puisse reconstituer un fonds de roulement.
Vous avez rouvert 100 points de vente sur la livraison et le drive depuis le 4 mai, allez en rouvrir 200 supplémentaires le 11, en introduisant la VAE. Comment avez-vous défini votre plan de reprise, et avec quels effets attendus sur vos ventes ?
Une fois que cette phase d’adaptation du réseau aux conditions de la crise a été complétée, nous avons pu commencer à réfléchir à l’avenir, et à nous préparer à la réouverture. Deux axes se sont naturellement imposés : la protection individuelle, des équipes comme des clients ; les leviers pour nous reconnecter à nos clients, car il ne suffit pas d’allumer les lumières pour que la fréquentation soit au rendez-vous, même si nous avons la chance d’avoir des intentions de revisite très élevées, notamment chez les 15-35 ans, qui représentent 72% de nos clients. Sur ces leviers, nous avions compris avant l’épidémie de Covid-19 que nos performances passent par le développement de nouveaux canaux de vente, en prise notamment avec les modes de consommation digitaux. La livraison via les agrégateurs a été introduite dès juin 2018 chez Subway, et nous prévoyions de mettre en place le Click and collect. L’épidémie a accéléré ces tendances : nous travaillons avec les plateformes pour quasiment doubler le poids de la livraison dans notre mix de vente et emmener sa part à 25-35% de nos ventes ; nous avons avancé le déploiement du Click and collect, via Deliveroo (144 restaurants) et UberEats (357 restaurants), pour être opérationnels sur ce canal dès la reprise d’activité. Sur ce canal, nous nous sommes donnés un objectif de 5% des ventes, mais je suis convaincu qu’il pèsera plus dans le mix au final.
Sur quelles hypothèse d’activité travaillez-vous ?
Sur cette première semaine, nous avons tablé sur des ventes à 30% des niveaux d’activité usuels, 40% à partir du 11 mai, 90% en septembre, et espérons retrouver intégralement notre dynamique commerciale d’ici la fin de l’année. Le maître-mot reste néanmoins la prudence, par rapport aux évolutions de l’épidémie bien sûr, mais aussi parce que si aucun des restaurants Subway n’a fermé à date en raison de l’épidémie Covid-19, grâce au dispositif d’accompagnement mis en place par les pouvoirs publics, il faudra que nos franchisés atteignent en 2021 les volumes d’affaires nécessaires pour être en capacité de rembourser leur PGE, au côté, souvent, des emprunts en cours.
Quid de l’offre et de son évolution ?
Nous avons fait le choix de n’opérer aucune coupe dans notre offre. Cela tient au concept Subway, basé sur la personnalisation des recettes, mais aussi pour prévenir la déception qu’il pourrait y avoir, après huit semaines de confinement, à ne pas retrouver en restaurants les ingrédients de son sandwich préféré. De la même manière, les évolutions de gamme, avec une édition limitée sur le poulet fumé, le développement d’une offre de produits, légumes et assaisonnements, saisonniers, comme les évolutions sur nos desserts n’ont pas été remis en cause par l’épidémie. Ils figureront comme prévu au menu-board de l’enseigne. Il n’y aura pas non plus d’augmentation des prix. Nous avons mis en place un outil d’aide afin que chacun des franchisés Subway puisse en fonction de son implantation définir son positionnement-prix, il sera précieux sur cette reprise d’activité. A contrario, il serait très risqué d’opérer sans discernement des augmentations de prix dans la période actuelle. L’objectif, dans cette phase de reconnexion à nos clients est plutôt d’aller dans le sens inverse : nous avons renégocié le prix de nos produits auprès de nos partenaires, et allons sans doute davantage promotionner ces prochaines semaines.
Article de YANNICK NODIN / Neorestauration.com – A retrouver en cliquant sur Source
Source : « Le maître-mot reste la prudence »