
Restauration collective : Derichebourg s’attelle à la relance d’Elior
L’assemblée générale d’Elior devrait approuver ce mardi l’opération de rapprochement avec les activités multiservices de Derichebourg. Son fondateur Daniel Derichebourg deviendra le nouveau pilote d’un ensemble pesant plus de 5 milliards de chiffre d’affaires et 134.000 salariés.
Ce 18 avril l’assemblée générale d’Elior devrait approuver l’opération de rapprochement avec Derichebourg. Et du même coup, le passage de témoin de Bernard Gault, actuel PDG du géant de la restauration collective, au fondateur de la société de services aux entreprises et à l’environnement, Daniel Derichebourg.
Fin décembre, les deux groupes avaient conclu un protocole prévoyant l’apport à Elior de l’activité Derichebourg Multiservices (DMS) : gestion de bâtiments, nettoyage, recrutement RH, intérim. Et échange, l’augmentation de la participation de Derichebourg dans Elior de 24,36 % à 48,4 % .
L’opération, qui valorise DMS à 450 millions d’euros – soit 9,1 fois son excédent brut d’exploitation pour 2022 – est financée par l’émission d’actions nouvelles d’Elior au profit de Derichebourg, au prix de 5,65 euros par action. Ce qui offre une prime de 119 % sur la base du cours de clôture de 2,58 euros de l’action Elior au 23 novembre 2022, dernière cotation avant l’annonce des discussions.
Succession d’épisodes douloureux
Daniel Derichebourg doit démissionner de tous ses mandats opérationnels au sein du groupe qu’il contrôle avec sa famille, n’en conservant que la présidence, afin de se consacrer à la relance d’Elior, tandis que la direction générale de Derichebourg, recentrée sur l’environnement (en premier lieu le recyclage), ira au numéro deux, Abderaman El Aoufir.
Pour Elior, cela clôturera une succession d’épisodes douloureux. « Dans cette entreprise de 100.000 personnes, les employés de la base, à la conscience aiguë de leur rôle social, ont un rôle clé d’ambassadeurs auprès des clients de nos cantines. Mais cela suppose qu’ils soient dirigés par un chef d’entreprise sachant incarner ces valeurs-là », souligne Bernard Gault.
Les deux précédents patrons d’Elior n’avaient pas, à ses yeux, cette fibre-là, ni Philippe Salle avec qui le choc culturel était trop grand (il est parti depuis chez Foncia), ni Philippe Guillemot qui a attendu d’être renouvelé pour donner sa démission dans la foulée , sans transition ni précision sur son point de chute (Vallourec) laissant les équipes désemparées.
Fragilisée par la crise
C’était le 2 mars 2022, alors qu’Elior était déjà très fragilisée par la crise sanitaire. Le cofondateur de cette société née en 1991, Robert Zolade, avait alors appelé à l’aide l’un de ses fidèles compagnons de route, Bernard Gault, financier et administrateur indépendant d’Elior depuis mars 2018, lui confiant la direction générale par intérim, avec la perspective à terme de la présidence du conseil d’administration. Pourtant au final rien ne se passera comme prévu.
A son arrivée aux commandes, Bernard Gault s’attaque au problème numéro un, l’inflation : celle-ci a fait grimper de 18 % les prix des matières premières, lesquelles représentent le tiers des coûts dans la restauration collective, aux marges déjà minimes. Les résultats du premier semestre décalé d’Elior (du 1er octobre 2021 au 30 mars 2022) sont catastrophiques. Le patron intérimaire demande aux forces de vente de partir au dur combat de la renégociation des contrats, et leur offre pour les motiver un coaching et une incitation financière.
La machine a redémarré
« Cela a fonctionné, la machine a redémarré. Parallèlement, j’ai réduit de 30 % les coûts du siège pour l’exemple, supprimant des contrats de consulting, ou le service des achats centralisés, peu de fournisseurs étant mondiaux, et enfin j’ai changé le tiers du comité exécutif », poursuit-il.
Le résultat du second semestre s’est redressé, surtout en France, particulièrement sinistrée. « Et le 15 mai 2022, on s’apprêtait à choisir le directeur général quand est arrivée l’annonce surprise de la vente à Derichebourg des 14,7 % du capital détenus par BIM, le holding de Robert Zolade et du président du conseil d’administration d’Elior, Gilles Cojean », précise encore Bernard Gault. La donne a changé complètement, avec en ligne de mire une refonte de la gouvernance, Daniel Derichebourg souhaitant prendre le contrôle opérationnel effectif d’Elior. Les discussions avec le directeur général pressenti ont alors été stoppées net.
Gouvernance équilibrée
De ce fait, le 1er juillet 2022, Bernard Gault devient PDG, pour continuer le redressement de l’entreprise et discuter des modalités d’intégration du nouvel entrant. Derichebourg continue à monter au capital (près de 25 %), ce qui en fait de loin le plus gros actionnaire et il veut apporter à Elior ses activités de facility management pour en faire un poids lourd du multiservices à l’instar de Sodexo.
Bernard Gault met un point d’honneur à mener les négociations pour que la future gouvernance soit équilibrée, afin de rassurer les indépendants et les protéger d’éventuels abus de majorité. Il convainc Daniel Derichebourg, un moment désireux que son fils Boris dirige Elior, de prendre lui-même les rennes de la société encore en convalescence, malgré un désendettement et une trajectoire en phase avec les objectifs.
DMS, qui emploie près de 37.000 collaborateurs, va représenter un chiffre d’affaires additionnel pour Elior de 943 millions d’euros. C’est donc un groupe de 5,23 milliards d’euros, et 134.000 employés que Daniel Derichebourg s’apprête à piloter.
Par Martine Robert – A retrouver en cliquant sur Source
Source : Restauration collective : Derichebourg s’attelle à la relance d’Elior