Tourisme : les prix élevés retardent les réservations des Français pour les vacances

DÉCRYPTAGE – Depuis avril, voyagistes et agences de voyages observent un net ralentissement des réservations pour cet été. Les clients sont nombreux à attendre des promotions de dernière minute. Les destinations long-courriers sont les plus touchées.

Depuis trois ans, les Français avaient pris l’habitude de réserver tôt leurs vacances en privilégiant les plus belles chambres d’hôtels (avec vue sur mer) et les destinations lointaines les plus dépaysantes (Asie, Islande…). Cette année, à l’approche de l’été, leur envie de partir est intacte. Ils mettent pourtant le holà. Leur budget ne s’est pas amélioré et les prix des voyages restent élevés, en moyenne supérieurs de 25 % à leur niveau d’avant la pandémie. Alors que, au sortir du Covid, ils ont privilégié les vacances, en limitant d’autres dépenses (voiture, vêtements), cette année, ils sont nombreux à ne rien avoir réservé pour cet été, espérant des promos de dernière minute. Ceux qui étaient prêts à payer le prix se sont décidés tôt, les autres n’arrivent pas à franchir le pas. « Quand je regarde les prix des logements dans les Cyclades , c’est délirant, témoigne un Parisien, qui se sent piégé. J’ai acheté mon billet d’avion, sans m’inquiéter de l’hébergement sur place. Je ne sais pas comment je vais faire. »

Pour les professionnels du tourisme, tour-opérateurs et agences de voyages, l’heure du retour sur terre a peut-être sonné. Ils avaient signé des performances hors norme depuis la fin du Covid. Ils ne sont plus sûrs de rien pour les vacances d’été. Impuissants, ils constatent un net ralentissement des réservations depuis avril. « L’été n’est pas fait », reconnaît Valérie Boned, présidente des Entreprises du voyage. Selon le baromètre Orchestra réalisé pour le syndicat professionnel, les réservations décrochent. La dynamique était positive en janvier et stable en février-mars. Elle est tombée dans le rouge depuis. À date, pour des départs en juillet et août, le nombre de dossiers vendus est en recul de 4 % par rapport à l’an dernier. Le panier moyen progresse toujours (+ 4 %), à 2 730 euros. Mais le compte n’y est pas, pour faire une bonne saison. « Les réservations de juin seront déterminantes », résume Bastien Crochet, vice-président marketing et commercial chez Orchestra. Les voyages en long-courrier sont les plus touchés : fin avril, les réservations étaient en chute libre de 14,8 % en nombre de dossiers vendus. La France (- 3,8 %) et le moyen-courrier (- 4,1 %) sont aussi à la traîne.

« Mai-juin sont bons et septembre-octobre très bons, avec une forte demande pour l’Espagne, la Grèce et l’Italie, constate Franck Autret, directeur général des agences de voyages Salaün Holidays, qui compte 143 points de vente. Depuis le Covid, le gros des départs l’été se fait plus tard qu’avant, à partir du 14 juillet. Cette année, l’inflation tarifaire est telle qu’une partie de la clientèle ne peut plus suivre. C’est flagrant en août, avec des tarifs hors de portée pour beaucoup. » Pour un séjour en famille (deux adultes, deux enfants) dans un hôtel club à Majorque, comptez facilement 6 000 euros la semaine, vol compris. « Toutes les composantes des voyages sont plus chères : l’aérien, l’hébergement, la main-d’œuvre, les matières premières, l’énergie, précise le professionnel. Depuis 2019, le panier moyen a bondi de 39 % dans nos agences. Pour autant, nos marges n’ont pas augmenté à proportion. »

La France représente 20 % de nos ventes, pointe Guirec Le Morvan, directeur du réseau. Année après année, c’est notre destination numéro un.

Guirec Le Morvan, directeur du réseau E.Leclerc Voyages

Spécialiste des circuits accompagnés en groupes (entre 15 et 25 participants), Salaün Voyages a surtout vendu l’Italie, la Norvège et l’Espagne cet été. D’une manière générale, les Français privilégient dans cet ordre : la France, les destinations moyen-courriers et le long-courrier. S’ils sont moins nombreux à avoir réservé, ce palmarès reste inchangé cette année. La France reste leur destination privilégiée. Mais ils réservent généralement par leurs propres moyens : les voyagistes comme les agences de voyages en profitent peu, à l’exception de quelques agences spécialisées comme E.Leclerc Voyages.

« La France représente 20 % de nos ventes, pointe Guirec Le Morvan, directeur du réseau. Année après année, c’est notre destination numéro un. Cet été, nous avons surtout vendu des séjours en mobile homes dans le pays de la Loire, en Nouvelle-Aquitaine et en Occitanie. » Pas d’emballement néanmoins. Gîtes de France, qui regroupe 55.000 logements dans l’Hexagone, annonce un taux d’occupation stable par rapport à l’été dernier : 65 % en juillet et 68 % en août, avec en tête des départements les plus recherchés pour l’instant la Corse, les Pyrénées-Atlantiques et la Côte d’Or.

Tunisie, Baléares et Crète

À l’étranger aussi, les Français arbitrent en fonction de leur pouvoir d’achat. Chez Voyages E.Leclerc, ils ont plébiscité la Tunisie, les Baléares et la Crète. Selon Orchestra, la Grèce arrive toujours en tête du moyen-courrier, avec l’Espagne, la Tunisie et l’Italie. Mais le pays accuse des réservations en forte baisse, à cause de la hausse générale des prix. Particulièrement ses îles.

Côté long-courrier enfin, la dynamique des années précédente est retombée. Chez Asia, les réservations pour des départs entre le 15 juin et le 15 septembre, sont en baisse de 9 %. « Cela s’explique surtout par la baisse des départs au Japon (- 18 %), du fait de la cherté des voyages avec l’Expo universelle d’Osaka de la mi-avril à la mi-octobre 2025 », déclare Guillaume Linton, président d’Asia, un tour-opérateur spécialisé dans l’Asie-Pacifique. L’Indonésie (- 22 %) et la Thaïlande (- 17 %) sont également en forte baisse, à cause des tarifs très élevés sur l’aérien. À l’inverse, toujours chez Asia, la Chine marque son grand retour avec un volume d’affaires en nette hausse (+ 144 %) depuis l’été dernier. Des destinations plus inattendues tirent leur épingle du jeu : la Corée, la Polynésie, comme l’Ouzbékistan et toute l’Afrique australe.

Pour inverser la tendance, les professionnels ont une arme massive qu’ils n’utilisent qu’en dernier recours l’été : les promotions. On constate déjà des prix chocs sur des vols pour les États-Unis, boudés par les touristes du monde entier à cause de Trump. Pour Bali, on trouve des billets d’avion 10 à 15 % en dessous des prix pratiqués il y a un mois. Mais pour profiter de tarifs bien plus raisonnables et de sites bien moins fréquentés, rien ne vaut le « hors saison ». Même les professionnels du tourisme le recommandent chaudement aux clients, qui ne sont pas contraints par les vacances scolaires. « La Thaïlande est devenue quasi saturée en juillet-août, sur le golf du Siam, constate Guillaume Linton. Le bon plan, c’est d’y aller au printemps et à l’automne. »

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