Alimentation: comment l’inflation a transformé le consommateur 

«L’inflation a radicalement changé les shoppers», selon le panéliste Nielsen. Les consommateurs n’achètent plus les mêmes produits ni les mêmes marques. Ils ne font plus les courses de la même façon. Et les changements observés sont durables.

L’inflation est une préoccupation majeure pour les Français. C’est même «la première» aujourd’hui, selon une étude très complète du panéliste Nielsen. Près d’un Français sur deux est «inquiet de cette inflation durable» . La quasi-totalité d’entre eux (90%) font attention à leurs dépenses et 15% déclarent avoir sauté au moins un repas par mois au cours du dernier trimestre afin de faire face à la hausse des prix. L’alimentation n’est cependant pas la variable d’ajustement au quotidien. Le gaz et l’électricité cristallisent toute l’attention avant le gaspillage alimentaire, l’habillement et les sorties (restaurants et cinéma ..)

En deux ans, les dépenses annuelles, dites de grande consommation, ont progressé de plus de 600 euros, souligne Nielsen. Un tiers des Français déclarent limiter leurs achats de nourriture et d’autres produits essentiels dans le contexte inflationniste. Plus que jamais, ils recherchent les meilleurs prix et les promotions . Les achats de viande et de poisson en pâtissent et sont remplacés par d’autres sources de protéines. D’abord par les oeufs et la charcuterie, dans une moindre proportion par la viande blanche ou les conserves de poisson. Et très peu(1%) par les alternatives végétales.

La quête du prix ne va pas sans conséquence sur le choix des magasins et le volume acheté. On observe «une approche différente des courses», dit Nielsen. «Les paniers sont plus petits, les courses se font au jour le jour au détriment des gros caddies hebdomadaires». Plus de 16% des consommateurs privilégient les achats de proximité afin de limiter l’usage de leur véhicule.

Solderies

Les Français s’orientent de plus en plus vers les marques de distributeurs, les magasins discount et les promotions. L’enseigne Action ne séduit pas que les foyers modestes, même s’ils sont 52% à y être allés au cours des douze derniers mois. Un petit tiers de cadres supérieurs ont aussi poussé la porte de ce discounter néerlandais, devenu l’enseigne préférée des Français selon le baromètre 2023 du cabinet Ernst et Young-Parthenon, devant Decathlon et Leroy Merlin. Dans le même temps, «les enseignes à forte image prix (type Leclerc) surperforment et élargissent leur clientèle», ajoute Nielsen.

«Le vieillissement de la population est une réalité», poursuit le panéliste, et se fait ressentir sur la consommation. La France comptera 26% de plus de 65 ans supplémentaires d’ici 2040, soit 1,4 million de nouveaux consommateurs seniors . Cela va obliger les enseignes à s’adapter . «Proximité, amabilité et compétence sont les attentes des seniors vis-à-vis des hypermarchés», souligne Nielsen. «La qualité des produits frais est le critère le plus important pour 38% des seniors en France».

Les adaptations des grandes et moyennes surfaces découlant du vieillissement de la population ne s’arrêtent pas là. Elles vont ainsi devoir modifier leur offre au profit de «textures adéquates, d’aliments faciles à manger, moelleux et dont les bénéfices sont visibles», ajoute le panéliste. Les seniors privilégient les fromages à pâte molle, les fromages frais, le potage, la confiture et «les biscuits fins extra-moelleux», précise Nielsen. Plus que la moyenne des Français, ils prêtent une très grande attention à la composition des produits.

Petits paniers

Parallèlement au vieillissement des consommateurs, force est de constater une évolution de la taille des ménages, ainsi que du mode de cohabitation. Nielsen prédit que 40% des ménages seront des mono-foyers en 2030. «Il sera donc plus difficile de capter les dépenses des acheteurs de demain. «Il faudra convaincre trois acheteurs pour assurer le même volume de ventes qu’à une famille nombreuse», explique le panéliste.

Les mono-foyers s’orientent vers «des achats raisonnés et raisonnables», qui se caractérisent par des paniers et des formats plus petits. Pour ajuster au plus près les quantités, 71% des foyers mono-parentaux achètent en vrac . A la lumière de ces éléments, «les magasins de proximité et la livraison à domicile ont de beaux jours devant eux», précise l’étude.

Pour fidéliser les seniors et les mono-foyers, il faudra développer la praticité et s’adapter. «Proposer des produits tout prêts, frais, au bon format, dans les bonnes quantités avec des emballages lisibles valorisant les bénéfices des produits».

Dans l’immédiat, Nielsen prévoit une baisse des prix à la rentrée, période à laquelle ils seront malgré tout encore supérieurs de 17,6% au niveau enregistré en janvier 2022. Il faut en revanche s’attendre à une augmentation au moment des fêtes avant que de nouvelles baisses interviennent en mars, à la fin des négociations commerciales.

Par Marie-Josée Cougard

Source : Alimentation: comment l’inflation a transformé le consommateur