Bon App! : ce que Carrefour a appris sur le snacking

Carrefour a testé Bon App! pendant plus d’un an avant de valider le concept de son enseigne snacking. C’est le temps qu’il lui a fallu pour se débarrasser (partiellement) des codes trop « GMS » et flirter gentiment avec ceux de la restauration. Décodage en images.

Le concept lancé en mai 2017 à Arras est le fruit d’un patient apprentissage. Dans le sillage du « modèle » Monop’daily, apparu en 2007 (30 magasins aujourd’hui), les premières expérimentations de boutiques snacking chez Carrefour remontent à 2009. Un test, à l’époque, réalisé dans la galerie marchande de l’hyper urbain de Paris Porte d’Auteuil.

En 2010 et 2011, trois originaux Carrefour City Café avaient été ouverts, à Bordeaux et Paris. Sur moins de 200 mètres carrés, ce modèle hybride mêlait supérette et restauration sur place. Avec un vrai pari sur les mètres carrés alloués aux tables et alcôves pour les clients, et un investissement dans la fabrication de sandwiches fabriqués sur place.

Le concept City Café s’est révélé d’autant plus difficile à franchiser qu’à l’époque les clients ont finalement peu adhéré à la restauration sur place. Il a été abandonné en 2012.

En 2015, les deux premiers Carrefour Bon App! ont vu le jour à Paris. Rue du Temple, dans le quatrième arrondissement de Paris, le distributeur avait récupéré les 43 mètres carrés d’un ancien Proxi. Sur une surface aussi réduite, et fort des enseignements tirés de City Café, Carrefour faisait l’impasse sur la restauration sur place.

Moins « supermarché de papa »

Une quinzaine de mois d’expérimentation ont permis à Carrefour de comprendre que son concept, trop typé « grande surface », peinait à s’imposer comme un rendez-vous de restauration.

Les codes graphiques de l’enseigne, donc, ont été revus. Plus dans l’air du temps et moins « supermarché de papa » (tant pis si le look de l’enseigne s’éloigne encore plus de celui de la MDD bon app, dédiée à l’offre snacking de Carrefour).

La restauration sur place a fait son retour dans le concept. Même si, rue du Temple, le distributeur se contente faute de place de deux tabourets et d’une courte console en vitrine. « Les clients l’apprécient aujourd’hui, observe Christophe Rabatel, le directeur exécutif de Carrefour Proximité. L’expérience City Café nous a juste montré qu’il ne fallait pas avoir raison trop tôt. »

La communication de Bon App!, elle aussi, a changé. Finie l’accroche sur le café à un euro. En vitrine, désormais, ce sont les menus qui interpellent le client, formule repas à 6,50 euros ou petit-déjeuner à 3 euros (jus d’orange pressé à la machine, café et viennoiserie cuite sur place).

790 références

L’offre a évolué. Elle s’est étoffée et la MDD bon app, toujours en bonne place, se retrouve néanmoins moins omniprésente. Avec 200 codes bon app alignés rue du Temple (soit 25% de l’assortiment du site, porté à 790 références), le magasin ne reprend même pas l’intégralité des 250 produits au catalogue.

Carrefour a préféré introduire dans ses magasins snacking des offres inédites, à l’image de la jeune marque « on vous veut du bien » (des recettes sans conservateurs inspirées de la street food, proposées par Bergams et le Kiosque à Sandwiches, qu’on commence toutefois à voir dans pas mal d’enseignes sur Paris).

Pour investir notamment le créneau du petit-déjeuner, l’incontournable machine à presser les oranges a fait son apparition, de même que les viennoiseries cuites sur place. Les baguettes ont à l’inverse disparu, ne laissant la place qu’à de petits pains individuels. Toute l’offre, chez Carrefour Bon App!, doit en effet être présentée en mono-portion (exception faite des bouteilles 1,5 litre, des paquets de chips et des sachets de confiserie). Au nom de la vocation « restauration » de l’enseigne, et parce que de toute façon la moitié des foyers, à Paris, sont composés de personnes seules.

Plus cher que Carrefour Express

Les nouveautés, en épicerie, sont mieux mises en scène. Dans un meuble dédié, avec éclairage intégré, et dans une « bibliothèque » accueillant un thème par mois (le bio, les États-Unis, la cuisine du monde, etc.). « Nous renouvelons 30 à 40% de l’offre chaque année », appuie Christophe Rabatel.

Côté prix, Carrefour Bon App! ne joue pas plus la parenté avec la grande distribution. L’enseigne snacking assume être plus chère que Carrefour Express ou City et préfère souligner son avantage sur d’autres offres de restauration rapide.

Carrefour Bon App! compte aujourd’hui six points de vente en France. En plus des deux pilotes parisiens, l’ouverture d’Arras en mai dernier a sonné le départ du déploiement. Cet été ont été inaugurés des magasins à Nice, Montpellier et Saint-Étienne. Une dizaine d’ouvertures supplémentaires (dont deux à Paris en octobre) sont dans les cartons pour les prochains mois. En ligne de mire, les rues passantes en centre-ville, mais aussi les lieux de flux (gares, aéroports) et, pourquoi pas, les sièges des grandes entreprises. Dans les bureaux de Carrefour France, à Massy, ça risque toutefois d’être compliqué : Elior et Paul veillent déjà jalousement sur toute l’offre de restauration des locaux !