Ce 27 février, les salariés du siège de Burger King ont été surpris, en arrivant sur leur lieu de travail, de découvrir deux grandes bâches proclamant : « Ça fait dix ans que vous faites notre pub. Merci et bon anniversaire ». Une opération que l’agence Buzzman a préparée en secret pour célébrer sa collaboration étroite avec le spécialiste de la restauration rapide sur sa publicité.

Depuis son grand retour en France à la fin de 2013 et son déploiement sous la houlette du groupe Bertrand, l’enseigne de restauration rapide a, en effet, adopté une stratégie remarquée et bien à elle en matière de communication.

Qu’est-ce qui rend le ton des publicités de Burger King spécifique ?

Pour se redéployer dans l’Hexagone face à McDonald’s après des années d’absence, Burger King a adopté une position de challenger au ton décalé, capable d’attirer l’attention avec des communications prenant souvent la forme du clin d’oeil. Une stratégie qu’il maintient depuis dix ans malgré sa montée en puissance.

« Le grand public a toujours plus d’affection pour un challenger. Il s’agit de se renouveler en permanence, de s’approprier les réseaux sociaux, d’avoir de l’autodérision mais aussi de jouer au chat et à la souris avec les consommateurs. L’objectif est de sortir du lot d’une manière générale, pas seulement dans l’univers du fast-food », analyse Georges Mohammed-Chérif, président et directeur de la Création de Buzzman. Il souligne le rythme de production publicitaire élevé de l’enseigne qui atteint quelque 50 campagnes par an, tout confondu.

« Nous avons une promesse de marque simple autour d’un plaisir accessible à tous. Les campagnes la reflètent avec une dimension empathique liée au quotidien des gens et associée à un esprit un peu audacieux. L’ADN est américain mais la personnalité est française », ajoute Alexandre Simon, le directeur général de Burger King.

Pour préserver ce positionnement contrant le fait que ses budgets sont moins importants que d’autres grandes griffes, l’enseigne ne teste pas les campagnes auprès du public avant leur lancement. « Nous n’hésitons pas à sortir de notre zone de confort », poursuit le dirigeant.

Quelles sont les campagnes les plus emblématiques ?

Certaines communications ont été marquantes. A l’instar de celle menée en plein Covid et fermeture des restaurants sauf pour la livraison et la vente à emporter. Elle interpellait les Français avec un gros titre : « Commandez chez McDo ». Le texte en dessous précisait : « on n’aurait jamais pensé vous demander ça un jour. »

L’objectif était d’inciter les consommateurs à acheter dans différents types d’établissements, y compris chez Burger King, pour soutenir un secteur employant de nombreux salariés. L’enseigne n’hésite d’ailleurs pas à faire régulièrement référence à la concurrence pour mieux se démarquer.

En 2016, alors qu’elle avait moins d’une cinquantaine de points de vente, elle montrait des clients préférant faire 250 kilomètres pour déguster ses burgers mais s’arrêtant chez McDonald’s pour prendre un café à emporter avant de faire la route. En 2022, un spot met en scène des clients en train de se disputer sur le meilleur produit à déguster parmi ses rivaux avant de se mettre d’accord sur le Whooper.

Les campagnes ne se contentent pas des médias classiques. Elles touchent aussi bien les boîtes de livraison que les poubelles. « Parmi les opérations les plus emblématiques figurent les « Angry Tweets ». Nous avons choisi d’innover en utilisant pleinement les bâches sur les restaurants en train de préparer leur ouverture. Burger King y répond à des messages postés sur lui », précise Georges Mohammed-Chérif.

Est-ce que la communication en France a inspiré d’autres pays ?

L’opération Burger Mystère, menée dans l’Hexagone en 2017, a fait des émules. Pour 2 euros, soit nettement moins que le prix normal, les clients ne savaient pas quel produit ils auraient dans la boîte. Une manière de faire découvrir la palette des références.

Le buzz a été conséquent sur les réseaux sociaux. Et au lieu des 800.000 boîtes prévues à l’origine, il en a été vendu 2,5 millions. L’idée a fait des émules en Espagne et en Allemagne.

Quant à la campagne « Commandez chez McDo » en pleine pandémie, elle a été reprise dans une trentaine de pays.

Où en est Burger King aujourd’hui en France ?

Depuis sa renaissance chez nous il y a dix ans, l’enseigne s’est vite déployée. Elle compte aujourd’hui 520 restaurants en métropole auxquels s’ajoutent 17 points de vente à la Réunion. Elle avait notamment connu une accélération après le rachat de Quick par groupe Bertrand grâce à la conversion d’une partie des établissements en Burger King. Depuis, Quick France a été revendu à HIG Capital et vole de ses propres ailes.

Burger King a réalisé un chiffre d’affaires de 1,9 milliard d’euros en 2023. Il prévoit cette année l’ouverture d’une cinquantaine de points de vente, un peu plus que les 44 nés l’an dernier. La France est le deuxième marché de l’enseigne, après les Etats-Unis. Comme c’est aussi le cas de McDonald’s qui compte, lui, 1.560 établissements dans l’Hexagone.

La taille atteinte aujourd’hui peut-elle remettre en cause l’esprit de clin d’oeil de la communication ?

L’enseigne préserve cet état d’esprit. « Malgré la taille prise par l’entreprise, nous avons pris plus de risques. Plus une marque grandit, plus, au contraire, elle doit rester au plus proche de ses clients. La difficulté, c’est de continuer à surprendre les consommateurs », juge Alexandre Simon.

Ses campagnes poursuivent donc sur leur lancée. Avec succès. Sa dernière grande opération de recrutement en août et septembre 2023 mettait en scène un étudiant en médecine terrifié à la vue du sang et devenant équipier chez Burger King. Elle a reçu deux fois plus de CV que d’habitude.