Outre une quinzaine d'hypermarchés Géant supplémentaires, une centaine d'autres magasins déficitaires du groupe pourraient aussi être vendus, passés en franchise ou fermés dans le courant de l'année.

Casino vend six hypermarchés déficitaires à Leclerc

Le groupe stéphanois va recevoir 100 millions d’euros et supprimer un foyer de pertes de 8 millions d’euros.

Six hypermarchés Géant s’apprêtent à changer de pavillon pour passer sous l’enseigne Leclerc. Le groupe Casino a cédé six de sa centaine d’hypermarchés, ceux de Saint-Grégoire (35), Dole (39), Cholet (49), Castelnaudary (11), Anglet (64) et Castres (81). Il s’agit d’une grande première dans la distribution. Pendant des décennies, l’hypermarché était le format gagnant de la distribution. En signant des promesses de vente avec six adhérents Leclerc pour un total de 100,5 millions d’euros, Casino rompt le fil de l’histoire.

Au total, 45.000 mètres carrés de surfaces commerciales vont changer de main et d’enseigne. «Nous avons trouvé une solution pour ces magasins déficitaires qui seront cédés à un autre acteur de la distribution avec un reclassement du personnel à 100 %», précise Tina Schuler, directrice générale des enseignes Casino France et Leader Price.

L’hypermarché, qui représente encore plus de la moitié des ventes de produits de grande consommation en France (52 %, selon Kantar Worldpanel), voit ses parts de marché s’éroder depuis des années. Chez Casino, ce format, qui représente 20 % du chiffre d’affaires retail France, était devenu un foyer de pertes. Les magasins cédés ont réalisé 150 millions d’euros de chiffre d’affaires hors taxe cumulé en 2018. Mais ils perdaient 8 millions d’euros. La réduction de ces pertes contribuera à l’objectif d’augmentation du résultat opérationnel courant de Casino.

«Avec le fruit de ces cessions, nous allons réinvestir dans nos hypermarchés pour faire en sorte que le parc restant soit rentable»

Tina Schuler, directrice générale des enseignes Casino et Leader Price

Pour le groupe, qui s’est engagé dans un grand plan de transformation, il est temps de juguler l’hémorragie. «Nous avons engagé, il y a dix ans, un plan de transformation de nos hypermarchés, d’abord en réduisant les surfaces, de plus de 9000 m2 à 7000 m2 en moyenne aujourd’hui, et en misant sur le frais», rappelle Tina Schuler.

Après cette première phase, le groupe avait annoncé en septembre sa volonté de céder ses hypermarchés non rentables, dont le nombre est estimé à une vingtaine. «Avec le fruit de ces cessions, nous allons réinvestir dans nos hypermarchés pour faire en sorte que le parc restant soit rentable», décrypte Tina Schuler, qui pilotera encore 100 hypermarchés après la vente.

Outre une quinzaine d’hypermarchés Géant supplémentaires, une centaine d’autres magasins déficitaires (supermarchés Casino, supérettes Leader Price et magasins de proximité Petit Casino) pourraient aussi être vendus, passés en franchise ou fermés dans le courant de l’année, selon nos informations. Le fruit des cessions devrait aussi permettre de financer le nettoyage global du parc de magasins (8962 points de vente en France en 2018).

Le groupe assure qu’aucune décision ne sera prise dans la précipitation. Sous pression financière, Casino espérerait gagner au global 40 à 50 millions d’euros de résultat opérationnel courant en 2019 (ROC), le double l’année suivante. En 2017, le groupe avait déjà amélioré son ROC de 48 millions en France, pour le porter à 556 millions d’euros.

«Les acquéreurs pensent qu’ils sauront être plus performants que Casino pour gérer ces hypermarchés »

Frédéric Valette, directeur département Retail Insights de Kantar Worldpanel

Leclerc sort grand gagnant de la première salve de cessions d’hypermarchés Géant. Le groupement est le leader français de la distribution, avec 21,6 % de parts de marché (+0,5 point), selon le dernier Référenseigne Kantar Worldpanel, paru mercredi. «La tension est forte sur le marché de la grande consommation qui est stable en valeur (90 milliards d’euros, +1,1 % en 2018). Les acteurs se battent pour chaque dixième de point de part de marché», rappelle Frédéric Valette, directeur département Retail Insights de Kantar Worldpanel.

Les futurs propriétaires des Géant pourront soit se doter d’un hyper Leclerc supplémentaire, soit déplacer leur magasin dans une plus grande surface. Ces acquisitions vont renforcer la puissance d’achat du groupement et sa capacité à maintenir un indice de prix bas. Surtout, Leclerc veut prouver qu’il peut réussir là où Casino a échoué et redresser ces magasins. «Les acquéreurs pensent qu’ils sauront être plus performants que Casino pour gérer ces hypermarchés», confirme Frédéric Valette. La moitié des magasins cédés sont situés dans la région Ouest, où Leclerc est historiquement fort.

Le transfert effectif aura lieu au premier semestre, sous réserve de la validation par les représentants du personnel et des autorités compétentes. Commencera alors le travail de remodelage pour faire tomber les enseignes Géant et passer aux couleurs Leclerc. Casino n’est pas le seul groupe à réfléchir à la rationalisation de son parc. L’an passé, Carrefour a passé cinq hypermarchés en location-gérance, cédé 29 supérettes Dia non rentables et fermé 244 Dia.