L’enseigne vend des produits frais et locaux en sous-traitant ses rayons à des commerçants et producteurs indépendants.

C’est l’exception qui confirme la règle. Ou bien peut-être le modèle résilient d’une industrie en déclin. Grand Frais est la dernière success story de la distribution française. Pourtant, la chaîne de grandes surfaces spécialistes des produits frais n’existe qu’à travers des magasins « en dur ». A l’heure de l’e-commerce, son site Internet est purement éditorial. On y trouve des informations, des conseils et des recettes et l’adresse des 216 points de vente.

Ce distributeur, qui vient de se hisser au premier rang du classement des distributeurs des Français établi par le cabinet OC & C, c’est un peu le village gaulois de la distribution qui résiste à Amazon. Par quel miracle ? En appliquant les deux méthodes gagnantes du secteur : la gestion par des indépendants et une offre de produits de qualité, régionaux et issus – pour la plupart – de petites productions. Le concept a été créé en 1992 par Denis Dumont, un grossiste lyonnais de fruits et légumes.

La formule s’appuie sur la médiocrité (au sens propre de « moyen ») des rayons frais des supers et hypers traditionnels. Sur une surface moyenne de 1.000 mètres carrés, chaque Grand Frais propose une boucherie, une poissonnerie, une crémerie, une boulangerie (pas toujours), des rayons fruits et légumes ainsi qu’un peu d’épicerie afin d’éviter au client le détour par un autre magasin.

Royalties et loyers

La caisse est commune, ainsi que les services généraux (nettoyage, gardiennage, etc.), mais chaque stand est géré par un professionnel différent. Grand Frais c’est comme un marché, mais avec la mutualisation des moyens. Comme les propriétaires des grands magasins, Denis Dumont perçoit des royalties et des loyers. Il s’est installé en Suisse et, selon « Challenges », sa fortune est estimée entre 500 et 600 millions de francs suisses (entre 425 et 525 millions d’euros).

La chaîne réaliserait 1,5 milliard d’euros de chiffre d’affaires annuel. L’entreprise ne confirme pas les chiffres. Originaire du Nord, son fondateur fuit la presse, comme les Mulliez. Grand Frais a été développé avec le soutien de plusieurs fonds : Abénex et Five Arrows, puis Sagard, Siparex et Carvest. Mi-2017, Denis Dumont a cédé le contrôle de son holding Prosol à Ardian pour une valorisation de 1 milliard d’euros, selon « Capital Finance », la lettre spécialisée du groupe « Les Echos ». Le développement de Grand Frais ne s’arrêtera pas de sitôt. Il lorgne vers l’Italie.

Denis Dumont est entré récemment dans la banque italienne Creval, dont il a pris le contrôle du conseil. L’entrepreneur est un malin : pour installer Grand Frais dans une ville il n’hésitait pas à racheter des primeurs en difficulté afin d’assécher le marché.