Inflation : la boulangerie de plus en plus sacrifiée par les Français 

Le secteur a encore vu ses ventes progresser de 5 % en 2023, selon Food Service Vision. Mais il a moins bien terminé l’année qu’il ne l’avait commencée. Une partie des Français n’achète plus autant ou opte pour des produits moins chers.

Retour à la normale pour les boulangeries-pâtisseries. 2021 avait été du pain bénit pour le secteur qui avait notamment bénéficié de la fermeture des restaurants une partie de l’année. En 2022, il avait encore connu une hausse de 9 % de ses ventes. 2023 marque la fin de cette période très dynamique.

Les ventes ont, en effet, vu leur progression ralentir. Malgré la hausse des prix liée à l’augmentation des coûts, elles ne se sont accrues que de 5 % l’an dernier, à 15,1 milliards d’euros, selon la Revue boulangerie-pâtisserie que publie Food Service Vision. Surtout, la situation s’est dégradée au fil des mois alors que le premier trimestre s’affichait au-dessus de 10 %. En novembre, il n’enregistrait que 1 % de plus qu’en 2022. En cause : une évolution du comportement des consommateurs.

Ouverture d’une nouvelle séquence

« Une nouvelle séquence s’ouvre. Les Français continuent à fréquenter ces points de vente très régulièrement. Mais ils opèrent des arbitrages. Une personne sur cinq achète moins de produits. Certains optent pour des types de pâtisserie ou de snacking moins chers », relève Michael Ballay, directeur associé chez Food Service Vision.

D’autant que la filière a dû répercuter des hausses du tarif des ingrédients qui l’ont encore plus touchée que la restauration. Le beurre, la crème ou le chocolat, cruciaux en pâtisserie, ont ainsi connu des augmentations très importantes. Sans oublier les gros besoins en énergie pour le pain.

L’un des facteurs de croissance des dernières années tient à la place prise par le repas de midi , aidée par une extension de l’offre comme les poke bowls ou par l’ouverture de terrasses. Le Salon Sirha Europain 2024, qui doit réunir les professionnels du 21 au 24 janvier à Paris porte de Versailles, a d’ailleurs renforcé la place accordée au snacking.

Aujourd’hui, plus de la moitié des Français se rend en boulangerie pour acheter de la restauration salée. Mais, depuis la rentrée, les cantines ont repris des parts de marché en même temps que le télétravail commençait à baisser.

Evolution accélérée

Le paysage évolue également. Sur les 32.600 points de vente français recensés par Food Service Vision, 30.100 sont des indépendants. Ils représentent 7 visites de clients sur 10. Mais les boulangeries de chaînes, de Marie Blachère à Paul, en passant par Ange, Louise, Sophie Lebreuilly ou Feuillette, continuent à grignoter du terrain. Avec 8 % des boutiques, elles pèsent 18 % du chiffre d’affaires contre 17 % en 2021.

Les indépendants ont perdu une centaine de boulangeries quand les réseaux en ont gagné environ 400, selon le cabinet. « Les points de vente qui ferment sont plutôt anciens, en milieu rural, tenus par des couples ne trouvant pas de successeurs. Les boutiques se portant bien se situent en zone urbaine ou périurbaine et sont très axées sur les moments de snacking », relève Michael Ballay.

En 2024, Food Service Vision prévoit la fermeture de 100 à 200 boulangeries-pâtisseries indépendantes fragiles. A l’inverse, il observe le nouveau tour que prend la bataille à laquelle se livrent les chaînes , qui ne se contentent plus des périphéries. « Elles s’attaquent aux centres-villes. Elles sont de plus en plus nombreuses à s’installer à Paris. Il y a fort à parier que le mouvement concernera aussi Lyon, Marseille ou Nantes », prédit l’expert.

Le cabinet considère que les perspectives à moyen terme de la filière restent plutôt bonnes, avec la nécessité de veiller à conserver des marges alors que les modèles économiques se montrent plus compliqués. La croissance devrait cependant être beaucoup moins rapide que dans les dernières années puisqu’il table sur un chiffre d’affaires de 15,6 milliards d’euros à l’horizon 2026, soit seulement 3,3 % de plus qu’en 2023. Quant aux ventes de produits de snacking, elles devraient être, à la même époque, 15 % supérieures à 2022.

Cinq profils de consommateurs

Food Service Vision distingue cinq types d’acheteurs en boulangerie-pâtisserie.

– 25 % de « snackeurs multi » : urbains, actifs, aimant le snacking et clients fréquents des chaînes.

– 23 % « d’épicuriens » : habitant plutôt en zone rurale et adeptes des boulangeries artisanales.

-18 % de « bio-engagés » : public souvent féminin, fan du pain bio, soucieux de bien-être et peu attiré par le snacking.

– 18 % d’« habitués » : très attachés à leur point de vente artisanal, peu sensibles aux prix.

– 16 % de « contraints » : visiteurs peu fréquents des boulangeries, très soucieux du prix, peu attentifs à leur alimentation.

Les « snackeurs multi » et les « épicuriens » constituent la clientèle privilégiée du secteur. Ils représentent 60 % des visites et 80 % de la valeur du snacking.

Par Clotilde Briard – A retrouver en cliquant sur Source

Source : Inflation : la boulangerie de plus en plus sacrifiée par les Français