Les grossistes portés demain par la restauration

Les villes s’étendent et, dans le même temps, les circuits de distribution se digitalisent et tendent à se relocaliser comme l’indique l’étude du cabinet Blezat Consulting. Assurément une carte à jouer pour les grossistes de la RHF. À eux de faire valoir leur identité de spécialistes du sourcing et de la logistique.

COMPORTEMENTS ALIMENTAIRES

Présentée le 5 octobre, lors des États généraux de l’alimentation, l’étude «  Comportements alimentaires de demain » s’adresse à tous les intervenants de la filière alimentaire et notamment aux petits. «  Les cibles principales sont les TPE et PME qui n’ont souvent pas accès à ce genre d’informations  », précise Bertrand Oudin, le dirigeant de Blezat Consulting et auteur de ce corpus. La logique de l’étude (à consulter en intégralité sur cgi-cf.com) est quasi mécanique : repérer les tendances fortes de l’alimentation (elle en retient 16), puis en identifier les moteurs avant d’en décrire les impacts. À ce jeu-là, trois dynamiques ont des effets majeurs sur le secteur de la restauration.
La première a pour nom la « métropolisation ». La moitié des emplois en France se concentrent dans une douzaine de pôles urbains de plus de 500 000 habitants. Résultat ? « Avec des trajets domicile-travail qui s’allongent, les Français se tournent vers la restauration à midi  », explique Bertrand Oudin. Restauration assise et snacking ont de l’avenir. Et la restauration d’entreprise ? « Ce modèle ne va pas forcément se développer », répond l’auteur de l’étude, avant de poursuivre : « Car nous allons vers des prises alimentaires personnalisées et nomades, mais pas obligatoirement pour consommer dans la rue. Bon nombre de consommateurs rapportent leur repas au bureau. »
Un marché même dans les petites villes
Christophe Mauxion, le directeur général du Groupe La Boucherie (enseignes La Boucherie, Le Bistrot du Boucher et l’Assiette au Bœuf), fait le même constat à une réserve de taille près. Pour lui aussi, la prise du déjeuner à l’extérieur est une tendance de fond, mais il existe, heureusement, un marché en dehors des grandes agglomérations. « Nous ouvrons des restaurants dans des villes de moins de 10 000 habitants », assène-t-il. La Boucherie est implantée à Loches (7  000 habitants) à quarante-cinq minutes de Tours, et à Ussel, en Corrèze, qui malgré ses 9  900  âmes réalise « plus de 1  M€ de chiffre d’affaires par an ».
La métropolisation va de pair avec le renouvellement accéléré des concepts ; les villes sont des espaces ouverts aux nouvelles influences. Aujourd’hui, les établissements de hamburgers et de bagels remplacent les bars à pâtes. Et demain ? « Les métropoles ont la taille critique pour rendre viables des niches de marché  », analyse Bertrand Oudin. La restauration chaînée doit réagir face à des entrepreneurs indépendants qui n’hésitent pas à se lancer en restauration sur des concepts même s’ils sont éphémères. Christophe Mauxion l’a compris. Tout en restant fidèle à son marché, celui de la viande, La Boucherie (plus de 140 établissements) fait des concessions aux tendances : vin au verre depuis deux ou trois ans, planches apéritives, côtes de bœuf et desserts (gros éclair au chocolat) à partager et, bien sûr, hamburgers. Cette dernière famille de produits, où se retrouvent aussi les tartares, assure aujourd’hui de 15 à 20 % des ventes.
La GD appelle les grossistes à l’aide
Sans surprise, à lire l’étude, la digitalisation est la deuxième tendance qui s’impose dans le monde de la restauration. Les clients sont avides d’informations sur les établissements qu’ils vont fréquenter et les produits qu’ils vont y trouver. Un patron de restaurant peut-il encore faire l’économie d’un site internet en 2017 ? Il favorise des services tels que la vente à emporter et la livraison à domicile qui sont de plus en plus demandés, « même si leur modèle économique reste à stabiliser », admet Bertrand Oudin.
Action donc, mais avec discernement. Un avis que partage le directeur général du groupe La Boucherie. « Nous testerons la vente à emporter et la précommande courant 2018 », annonce-t-il, avant de tempérer, « mais avec prudence car certaines chaînes l’ont fait pour des résultats qui ne sont pas terribles ». Explication. Pour commencer, tous les produits ne s’adaptent pas à la vente à emporter. Si les hamburgers et les viandes à mijoter, type blanquette et bourguignon, s’y prêtent bien, ce n’est pas le cas de l’entrecôte, l’un des best of du groupe. « Réchauffer une entrecôte au micro-ondes une fois chez soi, ce n’est quand même pas terrible ! », plaisante Christophe Mauxion.
La dernière tendance décryptée par le cabinet d’études lyonnais concerne les grossistes au premier chef. Dans les prochaines années, ils auront « un rôle clé à jouer car ils ont le savoir-faire logistique, une dimension mal maitrisée par les agriculteurs et les éleveurs », prédit l’auteur de l’étude. Ils seront en première ligne pour approvisionner les acteurs de la restauration collective contraints par la réglementation d’introduire de plus en plus de produits bio et locaux dans leurs menus.
Plus surprenant peut-être, les grossistes pourraient aussi faire leur retour dans les zones marché de la grande distribution. «  C’est un opérateur de Rungis qui me l’a dit, les hypers et supermarchés reviennent vers lui depuis six mois à un an », illustre Bertrand Oudin.
Pour la grande distribution dont les rayons fruits et légumes sont souvent montrés du doigt pour la médiocre qualité de leurs produits, malmenés dans la chaine logistique, les circuits courts pourraient en effet offrir une solution.

Source : Les grossistes portés demain par la restauration – Tokster