Le nombre de microbrasseries aurait doublé en cinq ans, pour atteindre 900 unités en 2016 en France. Une brasserie artisanale sur dix en France est créée par une femme.

Partout en France, on brasse. Le retour au « fait chez soi » s’est opéré dans le monde de la bière aussi. Au point qu’on évoque parfois la bière de salle de bains ou de cuisine. Un mouvement qui ne cesse d’enfler sans donner lieu à grand échec, si bien que le nombre de microbrasseries aurait doublé en cinq ans, pour atteindre 900 en 2016, sur un millier de brasseries toutes catégories. « N’importe qui peut s’installer comme brasseur. Il n’y a pas d’exigences particulières », dit Pascal ­Chèvremont, délégué général de Brasseurs de France. Il n’y a pas plus d’exigences que de définition légale de la micro-brasserie. Seul le Code des impôts fait la différence et ­considère comme brasserie artisanale celle qui produit moins de 200.000 hectolitres

Résultat, l’offre en termes de marques a littéralement explosé. « Il y a près de 5.000 marques de bière en France aujourd’hui », dit la zythologue (du grec « zythos », qui signifie bière) Elisabeth Pierre, spécialiste du secteur depuis près de trente ans. Les femmes apportent une contribution non négligeable à l’incroyable essor des petites unités. Elles sont à l’origine de la création d’une microbrasserie sur dix. Une sorte de retour à la tradition historique. Jusqu’au XIIIe siècle, date à laquelle se sont créées les corporations de brasseurs, c’étaient les femmes qui ­brassaient, rappelle Elisabeth Pierre.

Réveil des terroirs

La production des microbrasseries n’est pas encore significative, à moins de 5 % du total en France. Mais, paradoxalement, ce sont elles qui ont réveillé un marché en baisse pendant trente ans, jusqu’en 2014. Obligeant même les plus grands à repenser leur stratégie et à créer une offre sur ce segment. Elles ont apporté la dimension artisanale, réveillé les terroirs, les saveurs et les palais. La bière se veut locale, élaborée à partir des matières premières produites sur place et consommées dans la région. A base d’orge, d’avoine, de blé et de houblon, selon les cultures de la zone de brassage. « Cela a fait exploser une grande diversité de goûts que personne n’imaginait trouver dans un bière », explique Elisabeth Pierre.

Des fermes ont ainsi trouvé un nouveau souffle, des villages ont ressuscité autour d’une brasserie. Comme Chargey-lès-Gray (Haute-Saône), où Mathieu Bernard, fort de son diplôme de brasseur de l’université de La Rochelle, a ouvert brasserie et taverne pour les dégustations. Il y propose des bières très houblonnées, élevées en barriques. Chaque année, il élabore une bière en fût de nuits-saint-georges. Les arômes diffèrent. « Ils surprennent et séduisent des consommateurs qui ne voulaient pas entendre parler de bière jusqu’alors », fait valoir Elisabeth Pierre. Stéphanie Altermatt, qui a ouvert sa microbrasserie en plein coeur d’Annecy (Haute­-Savoie) propose quant à elle des initiations au brassage.

Ces nouveaux brasseurs sont jeunes et pour partie en reconversion professionnelle. Une grande majorité se forment au contact d’autres brasseurs du même type, recueillant les fruits d’expériences multiples. Ils fréquentent des centres professionnels dédiés en France et enrichissent souvent leur parcours en Belgique, au Royaume-Uni ou en Allemagne.

Source : Les microbrasseries réveillent la bière française, Conso – Distribution