Certaines marques, comme Brets, misent sur une différenciation forte, notamment à travers des saveurs régionales originales.

«Nous innovons chaque année avec trois ou quatre nouveautés» : comment la chips est devenue la reine de l’apéro

Certaines marques, comme Brets, misent sur une différenciation forte, notamment à travers des saveurs régionales originales. Henry Saint John / stock.adobe.com

DÉCRYPTAGE – Entre 2014 et 2024, leur consommation a bondi de 42%, selon les données de Circana. Les industriels ont su accompagner cet essor, notamment avec une offre sans cesse renouvelée.

Les chips, la star de l’apéro. Les Français en raffolent, et en mangent même de plus en plus. Entre 2014 et 2024, leur consommation a bondi de 42%, selon les données du panéliste Circana. Les Français restent toutefois loin des Britanniques, qui en consomment 2,6 kg par an contre un peu plus de 1 kg en France. Ce succès tient en grande partie à l’évolution des modes de vie. Depuis la crise sanitaire du Covid-19, les moments de consommation se sont multipliés, portés par le télétravail, le retour au bureau, mais aussi un besoin de «réconfort» dans un contexte anxiogène. «Les prises alimentaires bougent : le repas traditionnel laisse de plus en plus la place à des moments de grignotage, analyse Gaëlle Le Floch, directrice marketing chez Kantar. Certains industriels sont tellement habiles qu’ils arrivent à faire passer de la consommation de chips pour de la consommation de légumes.»

Les industriels ont su accompagner cet essor de la consommation avec une offre sans cesse renouvelée, notamment à base d’arômes de toutes sortes. Les ventes de chips aromatisées ont ainsi progressé de 9% en volume entre avril 2024 et mars 2025, tandis que celles des chips nature ont reculé de 0,3%, selon Circana. Les marques arrivent à se démarquer «via l’aromatisation, avec des épices d’ailleurs ou des inspirations de plats réconfortants comme la tartiflette ou l’aligot», analysent Thanh-Ly Nguyen, consultante, et Eléa Laurent, chargée d’études marketing chez Circana. Elles utilisent aussi des formats ondulés, des mini-paquets, voire des packs familiaux.

Des chips saveur yakitori ou bleu d’Auvergne

Du côté de Brets, on mise par exemple sur des saveurs régionales originales, comme la chips au bleu d’Auvergne AOP. L’entreprise bretonne, précurseur des chips aromatisées en France avec la saveur poulet braisé lancée en 1995, propose aujourd’hui plus de 30 recettes, du fromage du Jura au yakitori. «Nous innovons chaque année avec trois ou quatre nouveautés», souligne Laurent Cavard, directeur général d’Altho Brets. Le tout avec un cahier des charges strict : uniquement des arômes naturels, sans exhausteurs de goût, conservateurs ni colorants de synthèse. Le chipsier français revendique aussi un fort ancrage local, avec des pommes de terre françaises et une rémunération équitable des agriculteurs. Brets prévoit d’ailleurs l’ouverture d’une nouvelle usine en Bretagne, «toujours avec des pommes de terre françaises et, bientôt, une huile origine France».

La croissance du marché de la chips est d’autant plus remarquable dans un contexte de baisse de la consommation. «Les Français tendent aujourd’hui vers beaucoup plus de sobriété, avec une baisse généralisée des volumes dans l’alimentaire. Hors période exceptionnelle comme le Covid, le premier arbitrage reste la réduction des quantités achetées», note Gaëlle Le Floch, de Kantar. Et pourtant, sur la dernière année, les ventes de chips ont progressé de 6% en volume – et de 5 % en valeur -, selon Circana. Leur prix reste en effet abordable, les rendant moins sensibles aux arbitrages budgétaires.

Le snacking, nouvel eldorado de la chips

«La croissance des chips continue s’inscrit aujourd’hui dans la tendance du snacking, des repas sur le pouce et de la praticité», analysent Thanh-Ly Nguyen et Eléa Laurent. C’est désormais le troisième segment le plus porteur du snacking salé, derrière les graines et les biscuits apéritifs. La chips étant portée par la dynamique de l’apéritif. Selon le Syndicat des apéritifs à croquer, 98% des Français déclarent organiser au moins un apéritif par an. Ils sont même 31% à en faire un rituel hebdomadaire. «L’apéritif est devenu un véritable moment de détente et de convivialité, souvent préféré à une sortie coûteuse. Se faire plaisir à moindres frais devient un réflexe, surtout dans un contexte de baisse du pouvoir d’achat », observe Gaëlle Le Floch.

Sur ce marché en pleine effervescence, les marques internationales conservent leur leadership. La société américaine Lay’s, propriété du géant PepsiCo, reste en tête des ventes avec 26,5% de parts de marché, suivie de Brets (23%) et du groupe Intersnack, avec ses marques Vico et Tyrrells (17,4%). Si la demande est forte, la production française ne suit pas encore. Sur les 2 millions de tonnes de pommes de terre consommées en France sous forme de produits finis (frites, chips et purée), plus de 50% viennent de pays voisins, selon un rapport parlementaire. Un paradoxe pour un pays qui figure parmi les premiers producteurs européens de pommes de terre.

Source : «Nous innovons chaque année avec trois ou quatre nouveautés» : comment la chips est devenue la reine de l’apéro