L'apéro dinatoire tend à se substituer au dîner à table et alimente le dynamisme du marché des chips, cacahuètes et autres produits de snacking…Quand le snacking fait trembler le sacro-saint repas français

Le marché du snacking dépasse les 18 milliards d’euros en France et menace les trois repas traditionnels à table. Sur le modèle américain, les Français dépensent aujourd’hui beaucoup plus d’argent dans les chips et autres biscuits salés que dans des produits tels que les pâtes ou même les oeufs. Radiographie de cette bascule.

L’apéro dinatoire tend à se substituer au dîner à table et alimente le dynamisme du marché des chips, cacahuètes et autres produits de snacking… (iStock)

Les habitudes alimentaires évoluent à grande vitesse en France. Et si l’image de la gastronomie demeure encore, elle cache des modes de consommation qui n’ont plus grand lien avec la culture de Brillat-Savarin. L’apéro dînatoire s’est installé, le nomadisme et les grignotages en tout genre aussi. Résultat, le marché du snacking dépasse les 18 milliards d’euros.

L’évolution est telle que les Français dépensent aujourd’hui beaucoup plus d’argent dans les chips, cacahuètes, noix de cajou et biscuits salés que dans des produits tels que les pâtes alimentaires, la viande hachée, les oeufs, le lait et encore bien d’autres aliments.

Des chiffres sans appel

Les chiffres sont sans appel. Selon Circana, le marché des produits apéritifs a totalisé des ventes de 3,2 milliards d’euros sur douze mois glissants à fin août, affichant une progression proche de 5 %. C’est trois fois plus que les pâtes alimentaires (1,1 milliard d’euros) ou que la viande hachée (1,2 milliard d’euros). C’est près du double des ventes de jambon, un produit pourtant très prisé en France. C’est un peu moins du double des oeufs (1,8 milliard d’euros) et du beurre.

Les deux catégories les plus proches du pôle apéritif en chiffre d’affaires sont les yaourts (2,9 milliards d’euros) et le lait (2,4 milliards d’euros). En volume, le constat est le même, selon Circana. Les produits apéritifs surpassent chacune des catégories (yaourts, pâtes, oeufs, viande, etc.)

Comment en est-on arrivé là ? Beaucoup de changements sont attribués à la période du Covid. Y compris dans la sphère alimentaire. La crise sanitaire et ses confinements obligés ont nourri l’essor du snacking. « La consommation de chips a connu un bond exceptionnel à ce moment-là et elle a continué sur sa lancée », dit une experte de marché chez Circana. « Les produits apéritifs sont moins touchés par l’inflation et restent des petits plaisirs abordables. »

Télétravail…

Le télétravail lui aussi contribue à la vitalité du secteur. Il a amplifié le mouvement de déstructuration des repas en multipliant les pauses gourmandes. En milieu de matinée, les deux tiers des Français actifs s’interrompent pour grignoter et avaler une boisson, selon le cabinet CHD Expert-Datassential. A l’heure du goûter plus d’un français sur deux s’offre une gourmandise sucrée, de plus en plus fréquemment d’inspiration américaine (muffin, cookie, beignet…). Et même le soir, 25 % d’entre eux contre 11 % en 2021 optent pour une solution snacking.

Le déjeuner n’est pas le seul repas à avoir beaucoup évolué. Le petit déjeuner, qui est assez largement sacrifié au profit d’un rab de temps de sommeil, en particulier chez les enfants et encore plus chez les adolescents, a opéré sa mutation de plus longue date. Les industriels du lait, qui en subissent les conséquences, le déplorent abondamment. D’autres s’en félicitent, comme General Mills, qui a multiplié par quatre en deux ans les ventes de sa barre céréalière Nature Valley en deux ans.

Plus récemment, c’est le dîner qui a commencé à se transformer avec le succès grandissant des apéros dînatoires. Et c’est sans doute là que se sont opérés les plus profonds changements. C’est là aussi que les chips, cacahuètes, noix de cajou et biscuits salés ont trouvé un axe de développement exceptionnel.

Les lieux de vente se sont multipliés avec l’ouverture en deux ans de 5.000 nouveaux commerces spécialisés dans les produits de snacking. Les boulangeries et d’autres ont très largement exploité cet engouement en proposant sandwichs, wraps, pizzas et pâtisseries. Les deux tiers des Français achètent leur déjeuner pour un ticket moyen de 11 euros dans un Proxi ou un supermarché. Selon Kantar, 65 % des offres en GMS se consomment à domicile, ce qui représente une progression notable de 8 % en deux ans.

Par Marie-Josée Cougard – A retrouver en cliquant sur Source

Source : https://www.lesechos.fr/industrie-services/conso-distribution/le-grignotage-fait-trembler-le-sacro-saint-repas-francais-2119716