Cognac : les grandes maisons commencent à voir le bout du tunnel 

Après une année très chahutée, les grandes marques de cognac tablent sur l’amélioration des expéditions vers les Etats-Unis et la Chine. Mais « la reprise se fera de manière très progressive et en dents de scie ».

Le marché du cognac n’avait pas été aussi chahuté depuis longtemps. Après avoir battu des records à la hausse durant des années, les expéditions des précieux flacons charentais dans le monde ont plongé de 24 % (en volume) sur douze mois glissants à fin novembre 2023, selon le Bureau national interprofessionnel du cognac (BNIC).

Mais les acteurs du marché se veulent optimistes et misent sur un vrai redressement du commerce du cognac – et plus globalement des spiritueux -, avant l’été.

Lâcher le frein

Certains ont le pied sur l’accélérateur, comme Campari qui vient de réaliser sa plus grosse opération de croissance externe en s’offrant la maison Courvoisier , pour 1,2 milliard d’euros. Ce qui lui permet au passage de se hisser au quatrième rang des acteurs du cognac.

D’autres, comme Pernod Ricard, qui juge « les perspectives favorables » dans le secteur des spiritueux en général, augmentent notablement les investissements dans les distilleries de whisky .

« En 2023, nous avons investi près de 1 milliard d’euros dans le développement de nos capacités industrielles », souligne Alexandre Ricard, le patron du groupe Pernod Ricard.

C’est un effort sensiblement accru par rapport aux années précédentes, où ces dépenses dans les nouvelles constructions étaient de l’ordre de 600 millions d’euros.

Pernod Ricard a ainsi créé une deuxième distillerie Jameson. Il a fait bâtir sa première distillerie de Bourbon Jefferson, ainsi qu’une distillerie de gin au Japon. Le groupe dit avoir en outre augmenté ses capacités de production de single malt.

Les stocks américains

Des investissements enclenchés alors que les très gros marchés que sont les Etats-Unis et la Chine font défaut aujourd’hui, frappés dans les deux cas par une panne de croissance. Notamment sur le cognac.

Comment en est-on arrivé là après les scores enregistrés précédemment ? Plusieurs explications sont possibles, mais la raison majeure est que le Covid a bouleversé les habitudes et provoqué des comportements qui ont surpris les meilleurs prévisionnistes.

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Face à l’explosion de la demande il y a deux ans et par peur de difficultés à faire venir la marchandise, les importateurs américains – qui achètent trois fois plus de bouteilles de cognac que la Chine -, ont accumulé d’impressionnantes réserves en 2021.

En 2022, les aides fédérales destinées à soutenir la consommation pendant le Covid ont été supprimées. L’inflation a surgi. Le tout ayant pour effet immédiat de déprimer les ventes d’alcool, dont le cognac, surstocké…

Le marché américain des spiritueux est en cours de stabilisation tandis que le marché chinois a recommencé à progresser depuis deux mois.

Le plongeon des expéditions ne traduit donc pas une soudaine désaffection des consommateurs américains, affirme en substance le BNIC, pas plus qu’un déplacement de son intérêt vers d’autres boissons. Mais il reflète « un retour à la normale après des scores anormalement élevés pendant le COVID ».

La chute des ventes s’est amorcée en 2022 à -4,8 % puis s’est accélérée en 2023. Le cognac n’est d’ailleurs pas seul logé à cette enseigne. Toute l’industrie des spiritueux est concernée. Première surprise des ventes record post-Covid , elle a subi une très vive correction depuis plus d’un an.

Poursuite des investissements en Chine

Selon les dernières données du BNIC, le marché américain des spiritueux est en cours de stabilisation tandis que le marché chinois a recommencé à progresser depuis deux mois. Les professionnels espèrent beaucoup du Nouvel An chinois en février. En novembre, les expéditions totales sont encore en retrait mais nettement moindre, à -2,5 % par rapport à novembre 2022.

« 2024 devrait être l’année de la reprise, mais elle se fera de manière très progressive et en dents de scie. La consommation mondiale sera en demi-teinte », selon l’interprofession du cognac.

Le cognac VS, qui correspond au milieu de gamme de cet alcool, reste la catégorie la plus vendue aux Etats-Unis, tandis que le haut de gamme XO, nettement mieux valorisé est privilégié par les amateurs chinois. Les alcools importés ne représentent que 2 % des ventes de spiritueux dans l’empire du Milieu, massivement consommateur de Baijiu, l’alcool traditionnel.

Les professionnels français y voient « un potentiel de développement gigantesque ». Les maisons de cognac (Martell, Hennessy, Rémy Martin , Camus…) poursuivent d’ailleurs leurs investissements localement, en ouvrant des boutiques en propre.

Par Marie-Josée Cougard – A retrouver en cliquant sur Source

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