Les grossistes ne veulent pas rentrer dans le rang des lois Egalim

Les professionnels qui livrent restaurants et cantines sont vent debout contre la tentation de les assujettir aux mêmes règles de négociations commerciales que les supers et hypermarchés.

Les grossistes de Rungis qui approvisionnent notamment la restauration hors foyer ne veulent pas être assujettis aux règles qui encadrent la grande distribution.
Les grossistes de Rungis qui approvisionnent notamment la restauration hors foyer ne veulent pas être assujettis aux règles qui encadrent la grande distribution. (Gilles Rolle/REA)

Les grossistes tiennent à leurs règles d’exception, notamment pour ceux qui travaillent dans l’alimentation. A l’occasion de son bilan annuel, ce jeudi à Paris, le président de la Confédération des grossistes de France (CGF) a défendu le statut spécial que la Loi de modernisation de l’économie, en 2014, puis la loi Descrozaille, en 2023, ont conféré à ceux qui comme à Rungis, exercent le métier d’intermédiaire entre les agriculteurs ou les industriels de l’agroalimentaire et les entreprises de restauration.

Ce statut exonère ceux qui livrent les professionnels (restaurants, cantines, métiers de bouche) de l’obligation de ne pas négocier le coût de la matière première agricole, comme le doivent les distributeurs comme Leclerc ou Carrefour. En février, en pleine crise agricole, les patrons des grandes enseignes ont écrit au président de la FNSEA, le principal syndicat d’agriculteurs, pour lui rappeler que les supers et hypermarchés représentaient « moins de la moitié des débouchés des exploitations agricoles française : 35 % des débouchés des produits laitiers, 47 % des bovins, 48 % de la volaille… »

Etendre les obligations d’Egalim

« La question du revenu agricole, poursuivaient-ils, ne peut pas être traitée sans appréhender les autres débouchés : il est ainsi grand temps d’étendre les obligations d’Egalim aux acteurs de la restauration hors foyer, ainsi qu’aux grossistes industriels. » La guerre était déclarée.

La question se pose dans la perspective d’une nouvelle loi , dite Egalim 4, sur laquelle devrait déboucher la mission parlementaire que le Premier ministre a confiée aux députés Anne-Laure Babault et Alexis Izard. La boîte de Pandore des négociations commerciales est rouverte. Les grossistes veillent à ce qu’elle ne bouleverse pas tout.

« Notre spécificité est de négocier en amont avec les agriculteurs ou les industriels et en aval avec nos clients de la restauration hors foyer. De professionnels à professionnels nous avons réussi à passer les hausses de prix suscités par la guerre en Ukraine, la hausse du coût de l’énergie et des salaires, explique Philippe Barbier, président de la CGF. Dans les faits, nous respectons les coûts de production des agriculteurs. Nous ne voulons pas entrer dans la complexité qui touche les distributeurs et nous ne voulons pas de prix planchers [ce que le président de la République a proposé lors du Salon de l’agriculture , NDLR]. Nous estimons qu’au contraire, dans le cadre d’une économie encore libérale, la tendance devrait être à la simplification réglementaire. »

Le patron de la confédération qui regroupe 30 fédérations professionnelles dans tous les secteurs (médicaments, alimentation, matériel électrique, pièces détachées, etc.), 160.000 entreprises petites et grandes qui réalisent 900 milliards d’euros de chiffre d’affaires et emploient un million de personnes, souligne la bonne santé des grossistes.

Pas de prix plancher

En 2023, l’activité a progressé de 5,3 % (soit plus que l’inflation), après 9 % en 2022. Ces chiffres intègrent les difficultés des fournisseurs du bâtiment liées au quasi-arrêt de la construction neuve, l’essoufflement de la rénovation de l’ancien et le durcissement de l’attribution de MaPrimeRenov’ . «Depuis le début de l’année, même si les patrons sont inquiets pour l’avenir, la tendance positive se poursuit, notamment dans la restauration » complète Philippe Barbier.

Les principales difficultés des grossistes, outre l’accès aux coeurs de villes, tiennent au recrutement. Plus de 90.000 postes sont à pourvoir chaque année.

Les principales difficultés des grossistes, outre l’accès aux coeurs de villes, tiennent au recrutement. Plus de 90.000 postes sont à pourvoir chaque année et les candidatures manquent dans les trois métiers principaux que sont les commerciaux, les chauffeurs livreurs et les préparateurs de commandes. Une convention cadre avec France Travail vise à rehausser l’activité de ces métiers. Les grossistes embauchent tout en se posant en modèles des relations commerciales.

Par Philippe Bertrand – A retrouver en cliquant sur Source:

Source : https://www.lesechos.fr/industrie-services/conso-distribution/les-grossistes-ne-veulent-pas-rentrer-dans-le-rang-des-lois-egalim-2084280