Fragilisées par la crise du cognac en Chine, les entreprises de spiritueux attendent beaucoup d'une reprise aux Etats-Unis.Spiritueux : après le recul chinois, les incertitudes s’accumulent sur le marché américain

Les grands groupes alcooliers ont été sanctionnés en Bourse après les mises en garde du patron américain de la Santé publique.

Fragilisées par la crise du cognac en Chine, les entreprises de spiritueux attendent beaucoup d’une reprise aux Etats-Unis. (Rolf_52/Alamy/Abaca)

Plus que jamais, avec le recul de la consommation en Chine, le marché américain fait figure de planche de salut. C’est particulièrement vrai pour l’industrie de l’alcool et notamment pour les plus grands groupes de spiritueux, tels que le britannique Diageo, numéro un mondial, les français Pernod Ricard et Rémy Cointreau ou encore l’italien Campari, qui s’est hissé au sixième rang après une succession ininterrompue d’opérations de croissances externes menées par son ancien patron Bob Kunze-Concewitz.

Les Etats-Unis sont le plus gros marché au monde pour les vins, la bière et les spiritueux. Ils sont aussi le plus rentable. Mais les propos vendredi de Vivek Murthy, le patron de la Santé publique aux Etats-Unis, sur les liens entre le cancer et une consommation même modérée d’alcool ont fait l’effet d’une douche froide, certains investisseurs faisant un parallèle avec le sort qu’a connu l’industrie du tabac outre-Atlantique, après avoir été une formidable source de cash et une valeur refuge en Bourse pendant de nombreuses années.

Se fondant sur des éléments épars émanant d’études menées par diverses associations, Vivek Murthy a listé sept types de cancer, auxquels l’alcool expose les consommateurs. Afin de créer un sursaut de conscience, il a jugé nécessaire d’adopter une réglementation plus sévère passant notamment par l’apposition d’étiquettes très visibles et très explicites quant aux risques encourus sur les bouteilles d’alcool. Des mises en garde existent déjà pour les femmes enceintes et les conducteurs de machines.

Trump et l’alcool

Vivek Murthy a également souhaité que les recommandations actuelles de ne pas dépasser un verre d’alcool par jour pour les femmes et deux verres pour les hommes soient revues. « L’alcool est la troisième cause évitable de cancer aux Etats-Unis après le tabac et l’obésité », a-t-il ajouté. A la suite de ses déclarations, toutes les entreprises de bière, y compris Anheuser-Busch InBev et Heineken, et spiritueux ont clôturé en baisse sensible avec des chutes dépassant parfois 5 % en fin de semaine dernière.

Le patron de la santé publique, qui est aussi un ancien militaire, finit néanmoins son deuxième mandat, sans qu’à ce stade, on ne sache s’il sera reconduit dans ses fonctions. Le président Trump ne boit pas d’alcool. Robert F. Kennedy, qui pourrait devenir son ministre de la Santé, dit de son côté assister aux réunions des Alcooliques Anonymes (AA). A ce stade, rien n’indique cependant que le futur locataire de la Maison-Blanche souhaite suivre les recommandations de Vivek Murthy.

La Bourse a effacé ce lundi les baisses enregistrées vendredi. Mais la dépréciation des actions de certaines entreprises de spiritueux sur douze mois est abyssale. Les deux pieds habituels de la croissance des spiritueux, que sont les marchés chinois et américains, sont en crise pour le premier et ankylosé pour le second. Le plongeon du cognac en Chine , la mise en oeuvre par Pékin de surtaxes supérieures à 30 % sur les exportations de cet alcool rendent crucial un retour du dynamisme des ventes aux Etats-Unis.

L’action de Pernod Ricard a perdu 35 % de sa valeur en un an. Rémy Cointreau 45 %. Campari, qui a acquis le cognac Courvoisier en mai dernier, près de 42 %. Le britannique Diageo, qui ne détient pas de 13 %.

Le marché américain en 2024 était mal orienté après deux années exceptionnelles suivant le Covid, les fêtes moroses. En cause, l’inflation et une perte de pouvoir d’achat des classes moyennes. A cela s’ajoute le poids des stocks réalisés par les importateurs en prévision des hausses de prix. Leur mise sur le marché freine considérablement de nouvelles commandes. Les entreprises veulent encore croire à un retour à la normale, une fois ces réserves liquidées.

Par Marie-Josée Cougard – A retrouver en cliquant sur Source

Source : https://www.lesechos.fr/industrie-services/conso-distribution/spiritueux-apres-le-recul-chinois-les-incertitudes-saccumulent-sur-le-marche-americain-2140775